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la Sûreté Générale et avait eu, préalablement, une entrevue avec M. Clémenceau, ministre de l’Intérieur. »

Chaque pays agit de même, mais des volumes seraient nécessaires pour dire la millième partie des massacres froidement ordonnés et férocement exécutés : d’hérétiques, de révolutionnaires, de « sauvages ». Nous donnons ici quelques extraits d’un livre très documenté d’André Lorulot : « Barbarie allemande et Barbarie universelle », paru en 1921.

« Comment les Portugais ont-ils « colonisé » l’Amérique du Sud ? Voilà du reste, d’après le capitaine Palomino, exactement ce qui se passait dans ces petites excursions. Si les habitants recevaient les Européens en amis, les Européens les mettaient à la torture pour les forcer à avouer où se trouvaient leurs trésors. Si au contraire, ils abandonnaient leurs maisons, les Européens commençaient par y mettre le feu pour s’amuser, puis ils traquaient les fugitifs à l’aide de chiens dressés à cet effet et quand ils les avaient découverts, ils les empalaient ou les brulaient vifs. Quelquefois, en chemin, nos hidalgos remplaçaient leurs montures par des hommes. Ils en traînaient toujours une troupe derrière eux, attachés à la douzaine par un licol. Quand l’un de ces pauvres diables tombait de fatigue, ils lui coupaient la tête afin de ne pas être forcés d’ouvrir le cadenas qui fermait son carcan. (Gaston Donnet, Le Temps, 23 mai 1903). »

« L’Espagne ! c’est le Pérou ravagé par Pizarre, c’est le Mexique ensanglanté. C’est Cuba…

« Le général Weyler, à Cuba, avait donné l’ordre à ses subordonnés d’être sans pitié avec les insurgés et ils ne lui obéissaient qu’avec trop de zèle. Un jour, quelques insurgés se présentèrent dans une ferme et y reçurent l’hospitalité, les gens qui l’habitaient n’étant pas en force pour leur fermer la porte au nez. Après le départ des insurgés, un colonel espagnol fit arrêter les malheureux fermiers, une famille composée de six personnes (dont une jeune fille de 15 ans)… Après un interrogatoire sommaire, le colonel se retira dans un coin de la salle, se mit à genoux et demeura pendant une bonne demi-heure absorbé dans une muette et ardente prière. Enfin, le pieux guerrier se releva, la figure animée de l’inspiration céleste et donna l’ordre de fusiller les six malheureux. » (La Tribune de Genève (conservateur), 1er novembre 1897).

« Les correspondants des journaux anglais ont dit comment les Italiens, avaient sauvagement massacré 400 femmes et enfants et 4.000 arabes, en Tripolitaine.

« Le quartier arabe, dit le correspondant de la Westminster Gazette, a été envahi par des soldats surexcités qui, armés de revolvers, tiraient indistinctement sur les hommes, femmes et enfants qu’ils rencontraient. Les officiers étaient pires que les hommes. »

Voici maintenant à l’œuvre la France colonisatrice :

« Nos balles Lebel font des blessures effroyables et presque toutes mortelles… Nous avons eu 6 morts et 11 blessés. Les Dahoméens ont eu 400 morts et 600 blessés, dont beaucoup ont dû succomber à leurs blessures. C’est une vraie boucherie. » (Le Journal, 1892)

« Quelques tirailleurs ont été tués ou blessés. Afin de faire un exemple, le capitaine Voulet fait prendre vingt femmes mères avec des enfants en bas âge et les fait tuer à coups de lance, à quelques centaines de mètres du camp. Les corps ont été retrouvés et le fait est certifié par le capitaine Dubreuilh. » (Vigné d’Octon, Ch. des députés, 19 nov. 1900). »

Enfin, un dernier fait pour terminer :

« Une expédition, sous les ordres du commandant Gérard, chef d’état-major, parcourait le pays depuis

plusieurs semaines, ne rencontrant à peu près partout que des manifestations pacifiques. Forte de 1.000 fusils, elle se trouvait à deux heures d’Ambike où le roi Touère, chef du district, préparait une réception triomphale au commandant Gérard, étant animé vis-à-vis de la France des dispositions les plus pacifiques. À Ambike se trouvaient également MM. Blot, enseigne de vaisseau et Samat, agent des Messageries maritimes auxquels le roi Touère avait offert une hospitalité empressée. Tous deux vinrent rejoindre le commandant Gérard et l’aviser des excellentes dispositions du pays. Pour toute réponse le commandant Gérard prévint l’enseigne qu’il aurait le lendemain à prendre part à l’attaque. Quelques instants plus tard, il refusait de recevoir le roi Touère, venu à son tour pour lui présenter ses hommages.

Le lendemain, au point du jour, on entre dans la ville par six côtés à la fois. Le massacre commence. Surprise, sans défiance, la population entière est passée au fil des baïonnettes. Les tirailleurs n’avaient l’ordre de tuer que les hommes, mais on ne les retint pas ; ils n’épargnèrent pas une femme, pas un enfant. Le roi Touère fut tué ; les serviteurs de M. Samat furent tués. La ville ne fut plus qu’un immense charnier. Les Français vainqueurs ne perdirent pas un seul homme. Le nombre des morts fut de 2.500 au moins. Tous les blessés furent achevés. La Gazette officielle annonça qu’on avait fait 500 prisonniers ; c’était un mensonge. Pas un indigène n’était sorti vivant de ce massacre.

M. Galliéni, général, gouverneur, couvrit de son approbation M. Gérard qui eut un bel avancement… » C. A. Laisant. (La barbarie moderne, d’après Vigné d’Octon).

Les guerres sans fin qui ont ensanglanté l’humanité ont eu maintes fois le caractère de véritables massacres. Et la dernière en date mérite bien, au premier chef, cette triste gloire… Les rivalités des nations et des groupes d’affaires, les convoitises coloniales les méthodes intensives d’exploitation sociale, la soif de domination des partis politiques et religieux l’avidité l’ambition, l’intolérance persistantes, servis par les progrès de l’art de détruire, réservent aux générations prochaines d’autres mémorables hécatombes.

L’anarchie ‒ qui travaille à supprimer, avec l’autorité les causes de conflits entre les peuples, à tarir la source des haines, à éloigner du cœur des hommes l’hostilité et de leurs mœurs la violence ‒ ne pénètre que lentement de son influence bienfaisante la mentalité et les rapports humains. Et, avant que son esprit les ait vivifiés et épurés, l’humanité connaîtra encore ça et là, d’odieux massacres dont les patries, les religions et les classes seront le prétexte ou l’occasion. ‒ A. Lapeyre.


MASSUE n. f. Bâton noueux beaucoup plus gros par un bout que par l’autre. La massue est certainement l’arme la plus ancienne ; on la trouve dans tous les temps et chez tous les peuples. L’écriture en arme Caïn et Samson, de même que la mythologie la met entre les mains d’Hercule. Les Romains avaient dans leurs armées des combattants armés de massues garnies de clous ; Ils les appelaient : clavatores. La massue, sous le nom de « masse d’armes », a de même été employée dans la milice française jusqu’à la découverte de la poudre. Toutes les peuplades d’Afrique ou d’Amérique connaissaient la massue, Fig. et famil. : Coup de massue : Accident fâcheux et imprévu : ce fut pour lui un coup de massue.

Botanique : Partie supérieure du corps des champignons, lorsqu’elle se compose d’un renflement faisant suite au stipe ou qui en est séparé par un bord sensible. Massue d’Hercule : Variété de concombres ainsi nommée d’après la forme de son fruit. Massue des