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de la presse française. Au cas où, pour une cause impossible à prévoir, une attaque se produirait, le Gouvernement bulgare serait immédiatement mis en mesure d’y répondre ;

10° Il est entendu que le Gouvernement bulgare ne demandera pas aux organes précités de soutenir une politique d’expansion au détriment de tel ou tel de ses voisins. Mais, par contre :

1o La thèse de la récupération par la Bulgarie de territoires qui sont siens, thèse définie dans les trois lettres du Président du Conseil, M. Stamboulisky, à ses collègues grec, roumain et serbe, comme :

2o La question de son accès territorial à l’Égée ;

3o La question des minorités, auront une place faite sous forme appropriée dans les organes précités.

De même les organes précités, prenant en considération que l’intérêt de la France demande le relèvement économique de la Bulgarie, réserveront une place à ce problème pour éclairer, s’il y a lieu, à son sujet, et l’opinion et la commission interalliée qui siégera à Sofia.

Enfin, dans les rubriques bibliographiques des organes précités, il sera fait mention des ouvrages bulgares désignés par Sofia.

En présence de :

E. Roêls, Ch. était Rivet, V. Ganef, N. Stoiloff.

Ce pacte complété par une note dont voici la traduction :

Légation de Bulgarie

Archives secrètes
Protocole

Nous, soussignés, certifions que, conformément à la dépêche N° 645 du président du Conseil, M. Stamboulisky, en date du 17 avril, ce jour et en la présence de M..Charles Rivet, nous avons remis au rédacteur en chef du journal Le Temps, M. Roëls, représentant le groupe de journaux suivants : Le Matin, Le Journal, L’Écho de Paris, Le Temps, Le Petit Parisien, L’Information, le Gaulois, La Liberté, Le Petit Journal, La France Libre, et les agences : Information, Radio et Agence des Balkans, le chèque N° 23.111 pour la somme de sept cent cinquante mille francs français, émis par le Comptoir National d’Escompte de Paris, par compte du ministère des Affaires étrangères de Bulgarie à la Banque de France.

Paris, le 4 mai 1920. (Signé) : B. Ganef.

38, avenue Kléber. (Signé) : N. Stoiloff.

(Cachet de la Délégation bulgare à la Conférence de la Paix).

Nous pourrions multiplier la publication de documents démontrant le rôle néfaste de la diplomatie. La Russie dévoila, au lendemain de la Révolution, une certaine partie de la correspondance échangée entre les représentants des divers gouvernements d’Europe et la lecture de cette correspondance est édifiante. Mais la grande presse, en général, conserva le silence, et cela se comprend, en considérant le document que nous publions ci-dessus et qui lie les grands journaux de France au Gouvernement bulgare. Lorsque l’on sait que ce pacte, cet accord n’est pas particulier, mais, qu’en réalité, il en existe de semblables qui furent conclus avec d’autres nations, que la Presse se vend à n’importe qui, qu’elle se tait ou qu’elle parle selon que l’on paye ou que l’on ne paye pas, on est terrifié à la pensée que l’on est à la merci d’une poignée de coquins, dont l’intérêt peut déchaîner les plus terribles cataclysmes.

Nous disions, d’autre part, traitant de la concurrence (voir ce mot) : Chaque fraction du capitalisme en lutte se défend par l’intermédiaire de son Gouvernement et la concurrence de nation à nation est l’unique cause des négociations interminables qui se poursuivent

depuis des années et des années. Le Capitalisme inter national cherche un terrain d’entente, et lorsque les intérêts particuliers n’ont pu se concilier autour du tapis vert de la diplomatie, alors on donne la parole au canon et c’est la guerre fratricide, criminelle, monstrueuse, qui est chargée de régler le différend.

Et, en effet, la Société est une vaste entreprise commerciale et le diplomate peut être comparé à un représentant qui cherche à vendre une marchandise le plus cher possible ou à en obtenir une autre dans les conditions les plus avantageuses. À quoi, sinon à des tractations commerciales, se livrerait toute cette armée d’agents diplomatiques, qui coûte si cher à entretenir, et dont les travaux ont, parfois, un résultat tragique ?

De quoi discutaient avant la guerre, tous ces ambassadeurs, tous ces ministres ? Était-ce du Cochon serbe ; de Constantinople que réclamait la Russie afin d’étendre son commerce extérieur ; du Traité de Francfort qui accordait à l’Allemagne certains privilèges commerciaux lui permettant d’exporter en France une grande quantité de ses produits ; de la puissance maritime anglaise, de son empire colonial, nuisibles aux intérêts du capitalisme des empires centraux ? Quelles furent, et les difficultés devant lesquelles se brisa l’habileté des diplomates et les causes directes de la guerre ? Les divers ouvrages diplomatiques, relatifs à toutes ces questions, et publiés par les divers gouvernements, rejettent la responsabilité sur les uns et sur les autres, mais c’est en vain que l’on chercherait dans les nombreux livres diplomatiques de toutes couleurs, une parcelle de vérité. Ce qui est vrai, ce qui ne souffre aucune contradiction, c’est que le capitalisme voulait la guerre en 1914 comme il la désirait en 1870, et que la diplomatie s’efforça d’en masquer les raisons, et d’aveugler le peuple par ses subterfuges. Comment ne serait-elle pas secrète ? Comment pourrait-elle avouer, qu’elle ne se livre qu’à des tractations commerciales, industrielles, financières, au profit d’une poignée de parasites ? Comment pourrait-elle reconnaître qu’elle organisa la tuerie pour que l’Alsace et la Lorraine revinssent à la France et que la Compagnie des Chemins de fer de l’Est pût hériter de tout le régime ferroviaire de ces deux départements ; que, de son côté, l’Allemagne voulait se battre, parce que le traité de Francfort prenait fin, et qu’aussi elle avait l’espérance d’affaiblir la perfide Albion et de détruire son hégémonie mondiale ? Eh oui ! Elle est secrète et elle restera secrète la diplomatie. Elle ne peut se montrer toute nue. Maquillée, recouverte de brocard et de soie, elle semble jolie et appétissante ; mais lorsqu’on la découvre, lorsqu’on lui retire son manteau, elle apparaît sous son vrai jour : sale et répugnante, et soulève de dégout le cœur de celui qui la regarde.

Abjecte prostituée, elle s’est vendue hier, elle se vend aujourd’hui, elle se vendra demain, elle se vendra toujours.

Ses amants sont toujours les mêmes, et c’est toujours dans le même clan qu’elle les trouve. Pour satisfaire à l’appétit insatiable du Capitalisme, elle a livré à la mort des millions d’hommes et elle recommencera encore. Que nous prépare-t-elle ? Que nous réserve-t-elle ? Des carnages. Elle est en train d’organiser les tueries futures.

Elle a sacrifié hier aux maîtres de la métallurgie des milliers d’innocents, elle en sacrifiera d’autres demain aux caoutchoucs anglais ou aux pétroles américains.

Que l’on ne s’imagine pas que notre pessimisme repose sur des illusions ou sur des probabilités. C’est la brutale réalité du présent qui nous fait craindre pour l’avenir. Le monument diplomatique accouché à