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Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 2.djvu/101

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due. Et c’est ainsi que, non seulement pour satisfaire aux appétits des mercantis, on escroque le pauvre monde, mais encore on livre à la consommation des produits nocifs et malfaisants.

La soif d’argent du capitalisme ne connaît pas de limites. La bourgeoisie profite de toutes les occasions pour grossir sa richesse. La guerre de 1914-1918 fut pour elle une source de profits. Cela ne fut pas suffisant et elle spécule sur l’après-guerre.

La destruction d’une partie du territoire français, les ravages causés dans les centres du Nord, la misère et la détresse des habitants, permit au capitalisme d’organiser l’escroquerie des « régions libérées ».

Sur une centaine de milliards de francs alloués pour la reconstruction des départements dévastés par la guerre, par un jeu de combinaisons admirables parfaitement licites, le petit fut dépossédé au profit du gros. Et c’est toujours la même histoire ; la société le veut ainsi.

Les formes d’escroquerie sont tellement nombreuses que l’on s’étonne qu’une société puisse subsister dans de telles conditions. Personne n’échappe aux tentacules de l’escroc, et les sans-travail, les chômeurs, les misérables à la recherche d’un emploi, sont eux-mêmes victimes des procédés indélicats d’êtres sans aveu qui leur soutirent les derniers sous qu’ils ont en poche, en leur promettant des places avantageuses qui ne viennent jamais.

Tenter de réformer un tel état de choses serait folie. Ce ne sont pas les Anarchistes qui sont des utopistes, ce sont tous ceux qui prétendent rénover par des moyens légaux l’ordre social actuel.

Qu’on le veuille ou non, seule la Révolution, balayant toute la corruption qui règne souveraine, peut transformer la Société.

Nous avons eu pendant des siècles l’escroquerie religieuse ; nous avons aujourd’hui l’escroquerie laïque, l’escroquerie civile, l’escroquerie collective ou individuelle qui découlent toutes du capitalisme. Tant qu’une société, par sa forme d’organisation, par ses rouages, permettra au plus malin de tromper son semblable pour en tirer profit ; tant que le monde sera gouverné et dirigé par le mensonge, l’escroquerie subsistera. Elle est une conséquence du régime capitaliste et ne disparaîtra qu’avec lui. C’est aux hommes conscients, éclairés, qu’il incombe d’accomplir la tâche d’assainissement qui s’impose et d’entraîner derrière eux toutes les victimes de l’escroquerie sociale.


ESPERANTO. Langue artificielle d’étude facile qui, sans se substituer aux langues nationales, permet à des hommes de mœurs et de langage les plus différents de se comprendre et d’établir entre eux des relations.

Esperanto signifie : qui espère. C’est de ce pseudonyme que le Docteur Zamenhof, auteur de la langue qui a gardé ce nom, signa ses premiers ouvrages sur ce sujet. C’est qu’un grand espoir ranimait, en effet, ce chercheur lorsqu’il travaillait à son projet de langue universelle. (Voir ci-dessous Zamenhof).

Origine et structure. — L’Esperanto n’est pas composé de mots et de formes arbitraires nés dans l’esprit de Zamenhof ; il est le fruit d’un long travail de recherches et de comparaisons linguistiques.

Toutes les racines sont tirées des langues Indo-Européennes, le choix de l’auteur étant guidé par le seul souci de rechercher les plus répandues, sauf les cas où celles-ci offraient trop de difficultés de prononciation ou bien quand l’une d’elles, par trop de similitude avec une autre, pouvait prêter à confusion.

Pour la grammaire, elle est basée sur la plus simple : l’anglaise ; le vocabulaire est réduit au minimum par

le jeu des affixes et des prépositions employées comme affixes.

Dans les verbes, le nombre de temps est limité à l’indispensable pour la clarté du discours.

Toute la grammaire tient en 16 règles sans aucune exception. Les voici en peu de lignes :

1o Un seul article défini : la, pour tous les genres et pour tous les nombres, pas d’article indéfini.

2o Le substantif se termine toujours par o, auquel on ajoute j au pluriel. Deux cas seulement : le nominatif et l’accusatif, ce dernier est indiqué par un n final, les prépositions : de, al, per, por, etc., remplacent les autres cas.

3o L’adjectif prend la finale : a, les cas sont indiqués comme au substantif. Le comparatif se forme au moyen du mot : pli, le superlatif au moyen du mot : plej, le que du comparatif se traduit par : ol, le de du superlatif par : el.

4o Les adjectifs numéraux cardinaux sont invariables, on leur ajoute l’a de l’adjectif pour former les numéraux ordinaux, obi pour les multiplicatifs, on pour les fractionnaires, op pour les collectifs ; on place po avant les cardinaux pour indiquer les distributifs.

5o Les pronoms personnels sont : mi (je), vi (tu, vous), li (il), si (elle), gi (il, elle neutre), si (soi), ni (nous), ili (ils, elles), oni (on), précédés par la (le, la les) et, terminés par a, ils deviennent possessifs.

6o Le verbe n’a ni genre, ni nombre ; il prend les désinences suivantes : présent : as, passé : is, futur : os, conditionnel : us, impératif : u, infinitif : i, participe présent actif : ant, participe présent passif : at, participe passé actif : int, participe passé passif : it, participe futur actif : ont, participe futur passif : ot.

7o L’adverbe prend la finale : e.

8o Toutes les prépositions impliquent le nominatif.

9o Chaque mot se prononce comme il s’écrit.

10o L’accent tonique se place toujours sur l’avant-dernière syllabe.

11o Les mots composés sont formés par la réunion de mots simples, le mot fondamental placé à la fin.

12o Si un mot de sens négatif se trouve dans une phrase, on supprime l’adverbe de négation : ne.

13o Si le mot indique le lieu où l’on se rend, il prend l’n de l’accusatif.

14o Chaque préposition a, en Esperanto, un sens très défini sauf une : je qui s’emploie dans les cas douteux où toute autre préposition ne s’impose plus.

15o Les mots étrangers, c’est-à-dire ceux que presque toutes les langues ont empruntés à la même source ne changent pas en Esperanto, ils prennent seulement l’orthographe et la terminaison de la langue.

16o Les terminaisons des substantifs et de l’article peuvent se supprimer et se remplacer par une apostrophe. Cette règle s’appliquant principalement en versification.

Diffusion de l’Esperanto. — De 1887, époque où Zamenhof fit éditer son premier manuel, jusqu’en 1905 date du premier Congrès espérantiste tenu à Boulogne-sur-Mer, l’Esperanto rencontra bien des difficultés, mais sa création et ses débuts sont si étroitement liés à la vie même de son auteur, qu’il est impossible de les séparer. L’histoire de la langue est l’histoire de l’homme.

Après Boulogne commença seulement la période de propagande et de diffusion dans tous les milieux. Chaque année, sauf pendant la guerre, un Congrès réunit les délégués des espérantistes de tous pays et de toutes tendances groupés dans Universala Esperanta Asocio (U. E. A.), Association Universelle Espérantiste.

Cependant, il faut reconnaître que, contrairement à l’espoir de Zamenhof, l’Esperanto pénétra beaucoup plus rapidement dans les milieux bourgeois qui l’employèrent