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NOU
1807

qué connaissent les mortelles atteintes du béribéri du pigeon. Le citoyen du céleste empire qui demande au riz poli sa substance exclusive a tout à redouter de cet implacable béribéri. L’explorateur qui s’alimente de conserves s’expose aux atteintes du scorbut et du botulisme. Et la pellagre s’insinue dans le corps débilité du mangeur de polenta. Mais ajoutez, lorsqu’il est encore temps, à la ration du chien ainsi traité, des aliments crus ; à celle du pigeon le son exclu du blé dont il était nourri ; additionnez la pâtée de riz du fils de Soleil de quelques pincées de paddi, cette pellicule argentée qui enveloppe la graminée dont il s’est alimenté ; adjoignez aux conserves dévitalisées du coureur d’aventures quelques gouttes de citron ou quelques bouquets de cresson ; et agrémentez le menu du compatriote de Garibaldi de mets variés et vitalisés ; et vous verrez renaître à la vie ces moribonds dans un laps de temps plus ou moins long.

C’est que les aliments naturels contiennent en totalité ou en partie ces éléments mystérieux que la science n’a pu encore isoler et dont la carence absolue conduit infailliblement à ces curieuses et dangereuses avitaminoses, aux conséquences mortelles. Pour éviter ces graves conséquences il est donc essentiel de respecter leur intégrité en ne soumettant à la cuisson que ce qu’il est impossible de consommer cru et de ne pas débarrasser de leurs parties corticales ou sous-corticales les variétés alimentaires ou se trouvent justement inclus ces précieux éléments.

C’est en vertu de ce principe de conservation que le pain complet, pourvu des éléments péricarpiens, riches en vitamines, dont s’alimentaient nos pères, devrait être substitué à l’absurde pain blanc actuel. Et qu’il faudra composer des menus où figureront abondamment salades variées et fruits à l’état cru.

L’eau se trouve en abondance dans la plupart des comestibles. La teneur hydrique de certains atteint parfois le taux élevé de 95 %. Nous trouverons donc la plus grande partie du précieux liquide dans la ration quotidienne. En cas d’insuffisance justifiée par un travail musculaire intense (période de grande chaleur, etc.), nous ferons appel à son concours sous sa forme la plus simple qui est l’eau pure et nous dédaignerons les breuvages qui s’adornent du titre pompeux et mensonger « d’hygiéniques » et qui ne possèdent de cette qualité que le nom.

C’est grâce à l’eau que la circulation organique s’effectue, apportant aux cellules affamées les munitions nécessaires, véhiculant vers les émonctoires les déchets provenant d’usures constantes. Et bien des phénomènes d’osmose ne s’effectuent que par son intervention.

Nous clorons cette énumération alimentaire avec l’oxygène de l’air. Son importance est telle que l’homme qui en serait privé quelques minutes seulement ne pourrait échapper au sort fatal.

Ce précieux comburant pénètre dans l’organisme par les poumons et les pores de la peau qui sont, à ce titre, d’importants organes respiratoires. C’est lui qui, par sa combinaison avec le carbone, résultant de l’élaboration des autres aliments, libère l’énergie incluse thermo-dynamique qui assure son régulier fonctionnement. Il concourt également au mécanisme de la voirie organique en brûlant maints déchets toxiques qui perdent ainsi leur dangereuse causticité. Il convient donc de favoriser largement son intervention (à laquelle s’oppose malheureusement une pratique d’hygiène déplorable) en assurant une aération diurne et surtout nocturne des appartements (fenêtre largement ouverte pendant la nuit). Une vie physique active (culture physique, sport, etc.), s’impose également, favorisant une suroxygénation du sang qui répondra à ces desiderata. Cette intensive.oxygénation aux effets bactéricides trop connus interviendra de la plus heureuse façon.

Se superposant à toutes ces considérations, il en est une qu’il est. impossible de passer sous silence. Nous l’esquisserons brièvement.

Il ne suffit pas qu’une substance donnée possède toutes les qualités sus-énumérées pour justifier son introduction dans la diététique humaine. Il est indispensable qu’elle ne s’accompagne pas d’éléments perturbateurs et désagrégateurs.

Il n’est rien qui ressemble mieux à un champignon comestible qu’un de ses congénères vénéneux. Le caractère du deuxième, c’est qu’il contient, outre les éléments nutritifs du premier, un principe dangereux, souvent mortel.

Il est d’autres aliments aux apparences inoffensives recrutant tout au partie des qualités nutritives exigées et qui recèlent d’insidieux poisons dont les effets, pour lents qu’ils soient, n’en sont pas moins redoutables.

La viande est de ceux-là. Imparfaite déjà, parce qu’elle ne contient que quelques traces d’hydrates de carbone, cependant si nécessaires à l’effort musculaire, elle comprend, en outre, un surcroît d’albuminoïdes qui suffirait déjà à la déconsidérer. Son incompatibilité vient surtout de ce qu’elle est farcie de purines, ptomames, leurcomaïnes, poisons aux effets lents et néfastes pour l’homme, frugivore de nature, et dont les défenses organiques ne sont pas adaptées, comme c’est le cas des carnivores, à leur neutralisation. Les putréfactions intestinales qu’elle suscite au cours de la digestion, favorisant une formidable pullulation microbienne, s’additionnant aux autres méfaits dont elle est déjà chargée. L’imputation qui lui est faite, justifiée par les faits, d’engendrer ou de favoriser la naissance ou le développement des maladies telles que le cancer, l’appendicite, etc., suffit à imposer son exclusion d’un régime rationnel (voir végétalisme, végétarisme).

Voici, d’après le docteur Callière, par ordre de décroissance, l’importance toxique de certains aliments : thymus, foie, pancréas, cerveau, muscles, œufs, lait, légumes, salades. Les céréales, ces anti-putrides par excellence lorsqu’elles sont soigneusement mastiquées, sont incroyablement riches en hydrocarbonés, sels minéraux et vitamines ; les fruits peu acides, ces désintoxiquants parfaits dont la valeur alimentaire est aussi remarquable, peuvent figurer avantageusement au bas de cette échelle.

Soumis à l’expérience de la bombe calorimétrique, l’alcool dégage, en brûlant, un nombre respectable dé calories. C’est ce qui lui a permis de prendre figure d’usurpateur. Si, ingéré, il brûle dans l’organisme (sort que, dans le même cas, subit d’ailleurs l’éther, ainsi que le souligne le professeur Legris), c’est parce que sa présence dangereuse oblige celui-là à des mesures de voieries au premier plan desquelles figure sa destruction par la combustion. L’abaissement de température qu’il détermine chez des cobayes soumis au traitement du dangereux liquide, et les infériorisations et les insuccès des athlètes abreuvés de boissons fermentées infirment hautement la considération que des personnages abusés ou intéressés lui avaient concédée. Ni aliment, ni excitant, ses propriétés stupéfiantes et toxiques l’écartent systématiquement de l’activité alimentaire de l’homme (voir alcoolisme).

Nous abordons ici la gamme des excitants dont les rapports avec l’aliment véritable sont plus apparents que réels.

Si, par son corps gras de composition, le chocolat constitue exception, il ne mérite pas moins un ostracisme sévère, en raison de la présence en son sein d’un alcaloïde dangereux de l’ordre des purines ; la théobromine, dont l’action excitatrice s’accompagne inévitablement d’influences funestes. A défaut d’une exclusion totale, une tolérance vigilante devra en limiter la consommation.