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cent cinquante épibates qui n’auront qu’à se préoccuper du combat, plus une troupe considérable occupée à tirer les vivres de la cale pour les distribuer aux rameurs, soit en tout un équipage de plus de huit mille hommes.

C’est à cette époque que les Égyptiens construisirent les premiers bassins de radoub.

Soixante ans plus tard, les Romains et les Gaulois se livraient un combat à Vannes qui s’appelait Vénète, sur des galères primitives.

Pendant des siècles, les moyens d’attaque et de défense des bateaux à distance ne se composèrent que de lithobole et des feux grégeois (ces feux inventés par des moines byzantins au vie siècle avaient un effet terrible et l’eau n’avait comme pouvoir que d’en augmenter l’activité). Ce n’est que vers l’an 1515 que les navires furent armés de canons de bronze et de fer lançant des boulets.

Vers 1800, toutes les marines marchaient à la voile, ce n’est que vers 1844 que la vapeur fût appliquée à la marine militaire sur une grande échelle : bateaux à roues d’abord, comme l’on peut encore en voir quelques-uns dans le port de Malte ; puis la roue fut abandonnée pour faire place à l’hélice.

En 1860, Dupuy de Lôme construisit le premier bateau cuirassé blindé. Ce navire était terminé à lavant par un très fort éperon qui devait, à l’abordage, couper en deux les bateaux en bois existant à l’époque.

Peu à peu les ingénieurs modifièrent la forme et la puissance pour arriver au type Liberté, cuirassé d’escadre de 14.868 tonnes ; ce dernier fut détruit en rade de Toulon par une explosion qui se produisit le 25 septembre 1911, ensevelissant avec le navire environ 400 victimes.

Enfin, pendant la guerre 1914-1918 une nouvelle série dite « cuirassé d’escadre dreadnought » fut mise en service. Les unités du type Paris mesurent 165 mètres de long, 27 de large, jaugent 23.500 tonnes ; la puissance motrice de 26.200 chevaux est donnée par deux turbines ; la vitesse est de 20 nœuds, l’armement de 12 canons de 305 millim., 22 canons de 140 millim. et 4 tubes lance-torpilles sous-marins.

L’équipage se compose de 1.200 hommes ; le service du bord, affecte l’activité d’une petite ville, avec ateliers, boulangeries, prisons, etc. La vie y est extrêmement pénible, la discipline stupide et rigoureuse ; ajoutez à cela la mauvaise nourriture, et vous saurez pourquoi presque toujours une révolution commence par la révolte des marins.

Ces formidables forteresses, sur lesquelles comptaient les militaristes jusqu’au-boutistes pour écraser l’ennemi, firent preuve d’une impuissance totale, étant à la merci des torpilleurs, petits bâtiments légers, dont les plus grands atteignent environ 100 mètres, et principalement des sous-marins dont la dimension varie entre 30 et 100 mètres et l’équipage entre 12 et 80 hommes. Ces petits bâtiments naviguent en surface et plongent pour attaquer l’adversaire ; ils se dirigent en plongée au moyen du périscope ; une seule torpille lancée au bon endroit suffit pour anéantir un cuirassé moderne et les millions qu’il représente et engloutir tout l’équipage.

Certains affectent de voir dans les progrès réalisés tant dans la construction des bateaux, que dans leur vitesse et armement, le triomphe de la science domptant les éléments. Quoique ce raisonnement soit exact dans une certaine mesure, ce qu’il faut surtout retenir, c’est, comme toujours, le fait que les découvertes de la science sont utilisées ici au seul service de la malfaisance et de la destruction, la marine de guerre n’ayant d’autre rôle que de porter au loin l’asservissement, la misère et la mort aux peuples faibles, qui ne demandent qu’à conserver leur indépendance. La colonisation,

en attendant les guerres d’envergure, est le champ « pacifique » d’activité des ruineux monstres marins.

La marine marchande est ainsi dénommée parce qu’elle sert au transport des marchandises en même temps que des passagers. Elle englobe tous les bâtiments, petits et grands, se livrant au commerce, depuis les petits voiliers caboteurs (ne s’éloignant guère des côtes) jusqu’à leurs grands frères : les voiliers, à 5 mâts qui se font de plus en plus rares.

Une autre catégorie désignée à part sous le nom de bateaux de pêche, comprend les petits voiliers avec trois ou quatre hommes et aussi les Terre-Neuvas, beaucoup plus importante, qui partent chaque année pêcher la morue à Terre-Neuve, et les chalutiers à vapeur se livrant à différentes pêches.

Enfin les bateaux à vapeur qui sillonnent les mers en tous sens, depuis le cargo-boat de 100 mètres environ affecté au transport du charbon et du pétrole jusqu’aux grands bâtiments mixtes qui transportent marchandises et passagers, et dont certains, comme Le Foucault, atteignent 150 mètres de long, 18 mètres de large, déplacent 14.624 tonneaux, comportent 195 hommes d’équipage, et possèdent une force motrice de 6.900 chevaux et deux hélices actionnées par deux machines à triple expansion.

Nous arrivons enfin aux supertransatlantiques, genre Lutetia, qui effectuent les grandes traversées. Un tel bâtiment mesure 217 m. 50 de long sur 28 mètres de large. Le tonnage est de 39.900 tonnes. La force motrice propulsée au moyen de turbines à vapeur atteint 52.400 chevaux et permet une vitesse de 23 nœuds. On vient de lancer le super-paquebot Atlantique, destiné au service Bordeaux-Buenos-Aires, qui mesure 225 mètres de long.

Le luxe réalisé à bord pour l’agrément des riches passagers est inouï. L’on y trouve des jardins d’hivers, des salles de jeux, concerts, dancings, des courts de tennis, des appartements et des salons d’un confort aussi élégant que les plus opulents hôtels particuliers.

En nous reportant au premier bateau construit par Archimède, 215 ans avant J.-C., nous voyons que les dimensions sont restées sensiblement les mêmes ; par contre la vapeur a remplacé la voile, décuplant ainsi la vitesse et rapprochant de ce fait les continents.

Si nous envisageons la peine des hommes, nous constatons que peu de chose a été fait pour diminuer leurs souffrances. Autrefois, ils tiraient sur l’aviron, pendant que les maîtres se prélassaient sur le pont dans la contemplation des étoiles ou recevaient les baisers des femmes. Aujourd’hui, pendant qu’au son du jazz, les épidermes se frôlent et que les lèvres s’humectent dans l’étreinte et la possession, tout au fond de cette ville flottante, les soutiers enfouis dans les cales étouffantes et armés d’une pelle amènent sans trêve le charbon que les chauffeurs précipitent sans arrêt, dans la gueule des immenses chaudières qui produisent la vapeur pour actionner machines et turbines. Ces hommes sont nus, couverts de sueur ; la poussière de charbon vient se coller sur leur corps ; ils sont plus noirs que des Africains. Ce travail si pénible et malsain est, selon la coutume, mal rétribué et ceux qui l’accomplissent méritent bien le nom de modernes forçats de la mer. ‒ Georges Chéron.


MARQUE. s. f. (de l’allemand mark). Empreinte, signe qui sert à faire reconnaître une personne ou une chose. C’est ainsi qu’on dit : la marque d’une vaisselle, la marque du linge, la marque de fabrique, etc. L’instrument avec lequel on établit l’empreinte ou le signe porte aussi le nom de marque. L’impression qui se faisait au fer chaud sur l’épaule d’un condamné constituait une marque. La trace que laisse sur un corps une blessure, une éruption, une lésion est une