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Page:Faure - Histoire de l’art. L’Art antique, 1926.djvu/152

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La volupté du carnage - et du carnage lâche, la femme et l’enfant qu’on vole, ou brûle, ou mutile avec des ares et des râles de cruauté, le prisonnier qui n’a plus ses armes et qu’on éventre ou qu’on égorge - caractérise toutes les expéditions du pirate de l’Égée qui pille a côte d’Asie pour peupler les harems des chefs de Crète ou de Mycènes et de l’hoplite cuirassé qui incendie, rase ou rançonne les colonies éparses de l’Ionie à a Grande Grèce et de Chypre à l’Hellespont pour le compte de sa cité. Des populations entières sont livrées aux égorgeurs. Une duplicité atroce préside aux relations entre les villes rivales, dont le trafic est l’unique ressource, a trahison et le massacre le meilleur outil de combat. La grandeur, qui parfois s’impose aux jours de péril, est bafouée ou méconnue quand le péril est passé Dracon, Clisthène, Miltiade, les deux Cimon, Thémistocle, Aristide, Alcibiade, Timothée, Thrasybule sont exilés tour à tour.

Démétrios est condamné à mort. Éphialte est égorgé, Nicias aussi, ou forcé au suicide. Phocion, Philopoemen empoisonnés. Démosthène jeté aux fers. Cette rage de meurtre et de persécution s’exerce aussi bien sur les poètes ou les artistes que sur les hommes d’État. Hésiode est assassiné. L’exil frappe Alcée comme Théognis, Xénophon comme Hérodote. Phidias luimême est proscrit, comme Thucydide et peut-être Eschyle. Socrate doit boire a ciguë. Anaxagore, Platon, Lysias fuient Athènes, pour n’en être pas exilés. Aristote aussi, pour n y être pas mis à mort. Euripide, dit-on, est déchiré par des mégères. Pas un authentique héros, peut-être, puisqu’il faut flatter a canaille pour être admis, par l’Histoire qu’elle imagine, dans la famille des héros. _Race de marchands, de pillards, de comédiens, de rhéteurs, d’esclaves, de proxénètes, de politiciens. La tragédie de Troie et des Atrides n’est peut-être qu’un résumé symbolique des passions sans contrainte qui caractérisent ses mœurs. Elle avoue, par les dieux qu’elle crée, ses impulsions épouvantables. Ce ne sont pas, comme les dieux indous, des fatalités élémentaires, des entités d’instinct irrésistibles comme a naissance ou a mort, les marées,