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En Bengale

alors tous les ouvriers au front avec de la cendre et du carmin suivant leurs castes. Aux fonderies, on emploie surtout les Southals, une tribu aborigène ; noirs, petits, la face plate, ceux-là retirés dans un coin de l’usine, n’invoquent aucune divinité, mais se repaissent gloutonnement de quelques provisions apportées par des femmes en haillons. Les hommes du Penjab, la tête serrée d’une cotonnade voyante, et les mous et habiles Bengali qui portent avec grâce leur parasol de feuilles de palmier, se sont cotisés pour se procurer le spectacle d’un « natch » (danse de bayadères), l’accessoire obligé de toute réjouissance indigène.

De grands cercles se forment autour des danseuses, laides, déguenillées ; certains se perchent dans les charpentes de fer des ateliers, pour jouir plus commodément du spectacle. Une étoile musulmane, âgée de neuf ans, semble très appréciée, car une vive satisfaction se peint sur les visages noirs, attentifs à ses gracieux mouvements.

Philippe n’a pas été oublié. Un indigène serviable l’a décoré de fleurs d’hibiscus roses et rouges, et une petite cassolette d’encens fume devant lui.

Pourvu que ce rôle de dieu ne lui inspire pas l’orgueilleuse idée de se libérer de notre joug en cheminant demain vers Bénarès.