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Page:Faydit de Terssac - À travers l’Inde en automobile.djvu/163

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À Travers l’Inde en Automobile

disputent l’honneur de marcher près des bayadères ; comme un flot d’éternels enfants, ils s’avancent, s’amusant à cœur joie. Le dernier de tous arrive le marié, à dos d’éléphant. Sa petite forme enfantine, enfoncée dans les coussins soyeux d’une gondole d’argent, se distingue à peine. Il porte un chapeau de roi de charade en carton doré, et sa figure est cachée par des franges de fleurs qu’il écarte pour regarder autour de lui. Il nous aperçoit et se hausse en se retournant pour mieux satisfaire sa curiosité.

Il doit être âgé de dix ans à peine, car, suivant la coutume des Indes, on fiance les enfants dans le plus bas âge.

Les Indous attachent au mariage une importance capitale : celui qui ne laisse pas de fils pour continuer sa race et réciter les prières pour les ancêtres, n’entre pas dans la béatitude : son ombre inquiète, erre sur la terre, cherchant en vain quelqu’un qui pense à elle. La famille la moins élevée fait les premières avances ; on demande rarement les filles en mariage, c’est presque toujours aux parents du jeune homme que l’on s’adresse, surtout s’il est Brahme ou Radjput, d’un clan très illustre. Une proposition de mariage s’indique par une noix de coco pleine de roupies, de diamants, chez les Maharadjas, qu’un père de famille envoie à un des membres de sa caste par son barbier ou son directeur spirituel.

Si le voisin garde le fruit, le mariage est décidé en principe, il ne reste qu’à déterminer lequel de ses enfants est le plus éligible, les convenances d’âge, la dot, le jour et l’heure de la cérémonie.

Les astrologues sont consultés, ils examinent les conjonctions d’astres, la position du soleil, ils balancent l’influence de la lune, des planètes, puis, à l’heure propice, les Brahmes accomplissent les rites religieux.

Nous suivons le cortège jusqu’au temple et à la maison, devant laquelle, dans une enceinte faite de toiles à ciel ouvert, les femmes parentes de la mariée distribuent des crêpes et des vivres à tous les invités, assis par terre.

La fillette reste invisible, cachée derrière les fenêtres grillagées de ses appartements.

Dès que l’on nous aperçoit, des femmes se détachent des groupes et nous apportent de lourdes friandises, que nous croquons par politesse, puis tandis que les chants et les flûtes résondent avec un assourdissant tapage, nous filons à toute vitesse vers Ambre.

Pour attester la splendeur de cette cité vingt fois séculaire, il ne reste qu’un palais aux coupoles sans grâce, couronnant le pied d’une colline au pied de laquelle s’étend un lac.