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À Travers l’Inde en Automobile

Nous ne nous faisons plus du tout comprendre ; les populations sont grossières, la chaleur intolérable. Parfois, une ondée drue et mouillante tombe dans l’après-midi, nous forçant à interrompre l’étape quelques heures, ce qui nous retarde sensiblement et nous oblige à coucher dans les salles d’attente du chemin de fer.

Le pays est plat, très habité ; aux portes de Nellore nous rencontrons un couple d’indigènes qui viennent de Madras à pied. Ils nous renseignent sur la route, et vaguement nous comprenons qu’il faut traverser trois rivières sans ponts. Ces simples gens sont très pittoresques. L’homme guide un buffle gris, dont le dos efflanqué porte tout l’avoir de ce ménage, un « machan », quelques pots de terre, une natte d’aloès, il tient un singe en laisse, et un enfant à califourchon sur la hanche. La femme jeune, mais tout flétrie par la vie dure dans l’atmosphère brûlante, balance doucement sur la tête une corbeille d’où sort le vagissement d’un nouveau-né. Ils nous regardent craintivement et descendent dans le fossé en s’effaçant devant nous. Ils ne nous ont pas trompés, le soir nous sommes au bord d’une plaine sableuse, qui l’hiver devient une rivière. Des vipères se tordent dans les chauds replis du sable et quelques-unes ponctuent de virgules noires l’étendue jaune, d’autres, roulées en boules, apparaissent comme des galets plats ; il y en a des centaines. L’appréhension de leur mortelle piqûre, jointe à la difficulté du passage, nous décident à prendre le train jusqu’à Madras.