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Font qu’un autre Ruisseau se mêle avec votre onde,
Quand vous êtes unis, vous ne vous quittez plus,
À ce que vous voulez jamais il ne s’oppose ;
Dans votre sein il cherche à s’abîmer :
Vous et lui jusques à la Mer
Vous n’êtes qu’une même chose.
De toutes sortes d’unions
Que notre vie est éloignée !
De trahisons, d’horreurs et de dissensions
Elle est toujours accompagnée.
Qu’avez-vous mérité, Ruisseau tranquille et doux,
Pour être mieux traité que nous ?
Qu’on ne me vante point ces biens imaginaires,
Ces prérogatives, ces droits,
Qu’inventa notre orgueil pour masquer nos misères :
C’est lui seul qui nous dit que, par un juste choix
Le Ciel mit, en formant les hommes,
Les autres êtres sous leurs lois.
À ne nous point flatter, nous sommes
Leurs Tyrans plutôt que leurs Rois.
Pourquoi vous mettre à la torture ?
Pourquoi vous renfermer dans cent canaux divers ?
Et pourquoi renverser l’ordre de la Nature
En vous forçant à jaillir dans les airs ?