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Page:Fenelon - Aventures de Telemaque suivies du recueil des fables, Didot, 1841.djvu/210

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LIVRE ix.

le transport où ce discours de Mentor venait de le mettre, embrassa tendrement Mentor sans pouvoir parler ; et tous ces peuples à la fois, comme si c’eût été un signal, s’écrièrent aussitôt : Ô sage vieillard, vous nous désarmez ! La paix ! La paix !

Nestor, un moment après, voulut commencer un discours ; mais toutes les troupes, impatientes, craignirent qu’il ne voulût représenter quelque difficulté. La paix ! la paix ! s’écrièrent-elles encore une fois. On ne put leur imposer silence qu’en faisant crier avec eux par tous les chefs ! de l’armée : La paix ! la paix !

Nestor, voyant bien qu’il n’était pas libre de faire un discours suivi, se contenta de dire : Vous voyez, ô Mentor, ce que peut la parole d’un homme de bien ! Quand la sagesse et la vertu parlent, elles calment toutes les passions. Nos justes ressentiments se changent en amitié, et en désir d’une paix durable. Nous l’acceptons telle que vous nous l’offrez. En même temps, tous les chefs tendirent les mains en signe de consentement.

Mentor courut vers la porte de la ville pour la faire ouvrir, et pour mander à Idoménée de sortir de Salente sans précaution. Cependant Nestor embrassait Télémaque, disant : Ô aimable fils du plus sage de tous les Grecs, puissiez-vous être aussi sage et plus heureux que lui ? N’avez-vous rien découvert sur sa destinée ? Le souvenir de votre père, à qui vous ressemblez, a servi à étouffer notre indignation. Phalante, quoique dur et farouche, quoiqu’il n’eût jamais vu Ulysse, ne laissa pas d’être touché de ses malheurs et de ceux de son fils. Déjà on pressait Télémaque de raconter ses aventures, lorsque Mentor revint avec Idoménée, et toute la jeunesse crétoise qui le suivait.

À la vue d’Idoménée, les alliés sentirent que leur courroux se rallumait ; mais les paroles de Mentor éteignirent,