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TÉLÉMAQUE.

nées médiocres, de blé, de vin, d’huile, et des autres choses utiles : nous saurons par cette voie si la terre fournit de quoi nourrir tous ses habitants, et si elle produit encore de quoi faire un commerce utile de son superflu avec les pays étrangers. Examinons aussi combien vous avez de vaisseaux et de matelots ; c’est par là qu’il faut juger de votre puissance. Il alla visiter le port, et entra dans chaque vaisseau. Il s’informa des pays où chaque vaisseau allait pour le commerce ; quelles marchandises il y apportait ; celles qu’il prenait au retour ; quelle était la dépense du vaisseau pendant la navigation ; les prêts que les marchands se faisaient les uns aux autres ; les sociétés qu’ils faisaient entre eux, pour savoir si elles étaient équitables et fidèlement observées ; enfin, les hasards des naufrages et les autres malheurs du commerce, pour prévenir la ruine des marchands, qui, par l’avidité du gain, entreprennent souvent des choses qui sont au delà de leurs forces.

Il voulut qu’on punit sévèrement toutes les banqueroutes, parce que celles qui sont exemptes de mauvaise foi ne le sont presque jamais de témérité. En même temps, il fit des règles pour faire en sorte qu’il fût aisé de ne faire jamais banqueroute. Il établit des magistrats à qui les marchands rendaient compte de leurs effets, de leurs profits, de leurs dépenses, et de leurs entreprises. Il ne leur était jamais permis de risquer le bien d’autrui, et ils ne pouvaient même risquer que la moitié du leur. De plus, ils faisaient en société les entreprises qu’ils ne pouvaient faire seuls ; et la police de ces sociétés était inviolable, par la rigueur des peines imposées à ceux qui ne les suivaient pas. D’ailleurs, la liberté du commerce était entière : bien loin de le gêner par des impôts, on promettait une récompense