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TÉLÉMAQUE.

chariots, aux combats de lutteurs, à ceux du ceste, et à tous les autres exercices qui cultivent les corps pour les rendre plus adroits et plus vigoureux.

Il retrancha un nombre prodigieux de marchands qui vendaient des étoffes façonnées des pays éloignés, des broderies d’un prix excessif, des vases d’or et d’argent, avec des figures de dieux, d’hommes et d’animaux ; enfin, des liqueurs et des parfums. Il voulut même que les meubles de chaque maison fussent simples, et faits de manière à durer longtemps ; en sorte que les Salentins, qui se plaignaient hautement de leur pauvreté, commencèrent à sentir combien ils avaient de richesses superflues : mais c’étaient des richesses trompeuses, qui les appauvrissaient, et ils devenaient effectivement riches à mesure qu’ils avaient le courage de s’en dépouiller. C’est s’enrichir, disaient-ils eux-mêmes, que de mépriser de telles richesses, qui épuisent l’État, et que de diminuer ses besoins, en les réduisant aux vraies nécessités de la nature.

Mentor se hâta d’aller visiter les arsenaux et tous les magasins, pour savoir si les armes et toutes les autres choses nécessaires à la guerre étaient en bon état ; car il faut, disait-il, être toujours prêt à faire la guerre, pour n’être jamais réduit au malheur de la faire. Il trouva que plusieurs choses manquaient partout. Aussitôt on assembla des ouvriers pour travailler sur le fer, sur l’acier et sur l’airain. On voyait s’élever, des fournaises ardentes, des tourbillons de fumée et de flammes semblables à ces feux souterrains que vomit le mont Etna. Le marteau résonnait sur l’enclume, qui gémissait sous les coups redoublés. Les montagnes voisines et les rivages de la mer en retentissaient ; on eût cru être dans cette île où Vulcain, animant les Cyclopes, forge des foudres pour le père des