Page:Fenelon - Aventures de Telemaque suivies du recueil des fables, Didot, 1841.djvu/281

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LIVRE XII.


Télémaque, pendant son séjour chez les alliés, gagne l’affection de leurs principaux chefs, et celle même de Philoctète, d’abord indisposé contre lui, à cause d’Ulysse son père. Philoctète lui raconte ses aventures, et l’origine de sa haine contre Ulysse : il lui montre les funestes effets de la passion de l’amour, par l’histoire tragique de la mort d’Hercule. Il lui apprend comment il obtint de ce héros les flèches fatales, sans lesquelles la ville de Troie ne pouvait être prise ; comment il fut puni d’avoir trahi le secret de la mort d’Hercule, par tous les maux qu’il eut à souffrir dans l’île de Lemnos ; enfin, comment Ulysse se servit de Néoptolème pour l’engager à se rendre au siège de Troie, où il fut guéri de sa blessure par les fils d’Esculape.


Cependant Télémaque montrait son courage dans les périls de la guerre. En partant de Salente, il s’appliqua à gagner l’affection des vieux capitaines, dont la réputation et l’expérience étaient au comble. Nestor, qui l’avait déjà vu à Pylos, et qui avait toujours aimé Ulysse, le traitait comme s’il eût été son propre fils. Il lui donnait des instructions qu’il appuyait de divers exemples, il lui racontait toutes les aventures de sa jeunesse, et tout ce qu’il avait vu faire de plus remarquable aux héros de l’âge passé. La mémoire de ce sage vieillard, qui avait vécu trois âges d’hommes, était comme une histoire des anciens temps gravée sur le marbre ou sur l’airain.

Philoctète n’eut pas d’abord la même inclination que Nestor pour Télémaque : la haine qu’il avait nourrie si longtemps dans son cœur contre Ulysse l’éloignait de son fils ; et il ne pouvait voir qu’avec peine tout ce qu’il semblait que les dieux préparaient en faveur de ce jeune homme, pour le rendre égal aux héros qui avaient renversé la ville de