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Page:Fenelon - Aventures de Telemaque suivies du recueil des fables, Didot, 1841.djvu/422

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LIVRE xvii.

vous eussiez pris quelque détour pour lui apprendre vos desseins, elle les aurait rejetés, et aurait cessé de vous estimer. Elle ne se promettra jamais à personne ; elle se laissera donner par son père ; elle ne prendra jamais pour époux qu’un homme qui craigne les dieux, et qui remplisse toutes les bienséances. Avez-vous observé comme moi y qu’elle se montre encore moins, et qu’elle baisse plus les yeux depuis votre retour ? Elle sait tout ce qui vous est arrivé d’heureux dans la guerre ; elle n’ignore ni votre naissance, ni vos aventures, ni tout ce que les dieux ont mis en vous : c’est ce qui la rend si modeste et si réservée. Allons, Télémaque, allons vers Ithaque ; il ne me reste plus qu’à vous faire trouver votre père, et qu’à vous mettre en état d’obtenir une femme digne de l’âge d’or : fût-elle bergère dans la froide Algide, au lieu qu’elle est fille du roi de Salente, vous seriez trop heureux de la posséder.

Idoménée, qui craignait le départ de Télémaque et de Mentor, ne songeait qu’à le retarder : il représenta à Mentor qu’il ne pouvait régler sans lui un différend qui s’était élevé entre Diophanes, prêtre de Jupiter Conservateur, et Héliodore, prêtre d’Apollon, sur les présages qu’on tire du vol des oiseaux et des entrailles des victimes.

Pourquoi, lui répondit Mentor, vous mêleriez-vous des choses sacrées ! laissez-en la décision aux Étruriens, qui ont la tradition des plus anciens oracles, et qui sont inspirés pour être les interprètes des dieux : employez seulement votre autorité à étouffer ces disputes dès leur naissance. Ne montrez ni partialité ni prévention ; contentez-vous d’appuyer la décision quand elle sera faite : souvenez-vous qu’un roi doit être soumis à la religion, et qu’il ne doit jamais entreprendre de la régler. La religion vient