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LIVRE iv.

chasser devant eux toutes les étoiles du ciel, nous reprendrons, mon cher Télémaque, l’histoire de vos malheurs. Jamais votre père n’a égalé votre sagesse et votre courage : ni Achille, vainqueur d’Hector, ni Thésée revenu des enfers, ni même le grand Alcide, qui a purgé la terre de tant de monstres, n’ont fait voir autant de force et de vertu que vous. Je souhaite qu’un profond sommeil vous rende cette nuit courte. Mais, hélas ! qu’elle sera longue pour moi ! qu’il me tardera de vous revoir, de vous entendre, de vous faire redire ce que je sais déjà, et de vous demander ce que je ne sais pas encore ! Allez, mon cher Télémaque, avec le sage Mentor, que les dieux vous ont rendu ; allez dans cette grotte écartée, où tout est préparé pour votre repos. Je prie Morphée de répandre ses plus doux charmes sur vos paupières appesanties, de faire couler une vapeur divine dans tous vos membres fatigués, et de vous envoyer des songes légers qui, voltigeant autour de vous, flattent vos sens par les images les plus riantes, et repoussent loin de vous tout ce qui pourrait vous réveiller trop promptement.

La déesse conduisit elle-même Télémaque dans cette grotte séparée de la sienne. Elle n’était ni moins rustique ni moins agréable. Une fontaine, qui coulait dans un coin, y faisait un doux murmure qui appelait le sommeil. Les nymphes y avaient préparé deux lits d’une molle verdure sur lesquels elles avaient étendu deux grandes peaux, l’une de lion, pour Télémaque, et l’autre d’ours, pour Mentor.

Avant que de laisser fermer ses yeux au sommeil, Mentor parla ainsi à Télémaque : Le plaisir de raconter vos histoires vous a entraîné ; vous avez charmé la déesse en lui expliquant les dangers dont votre courage et votre in-