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Voici l’hiver !

Douleur contre nature, erreur de la Providence, appelez cela comme vous voudrez, mais c’est hor rible que l’enfant s’en aille avant le père !

La vieillesse est-elle donc si près de l’enfance, que la mort puisse se tromper de victime ?

L’hiver était venu autour de moi ; les feuilles tombées avaient laissé à nu le squelette dépouillé des grands arbres.

Le soleil pâle, de ses rayons sans force, éclairait ma promenade solitaire, et chaque fois que je parcourais l’allée des tilleuls, mon souvenir partait vers les absents, — les chers absents qui ne m’attendront pas longtemps.

Mon hiver est venu, à moi aussi, comme celui de la nature : je n’ai plus, pour me faire revivre, la gaieté d’un enfant ni les caresses d’une fille. Il fait froid dans mon cœur, comme au dehors.

Au lieu des souvenirs que je devais laisser dans leurs cœurs, ces chers êtres m’ont quitté les premiers, et c’est à peine si mon pauvre cœur brisé a la force de se souvenir quels ils étaient.

Leur âme à eux était jeune, charmante ; la vie leur souriait, tandis que moi…