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Page:Ferdinand Genissieu - En prenant le thé (1868).pdf/64

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En prenant le thé

Pour moi, je n’en voulais pas démordre : je me levai, allumai les bougies du piano, l’ouvris et le débarrassai des partitions qui l’encombraient. Puis, furetant dans le casier, j’installai sur le chevalet une valse de Chopin que je trouvai.

— Nous verrons bien, me disais-je.

Cela fait, m’armant de mon plus irrésistible sourire et m’avançant vers Mlle de K. : — Je vous en prie, lui murmurai-je à l’oreille d’un ton suppliant — pour moi, — et j’appuyai sur ces derniers mots.

Elle se leva ; — un léger tremblement nerveux agitait son bras qui reposait sur le mien. Elle s’assit sur le tabouret, et arrangea longuement les plis de sa jupe. J’étais, moi, à côté du piano, tout prêt à tourner les pages et en apparence fort indifférent à ce qu’elle faisait.

Elle défit les boutons de ses gants. — Si j’ai jamais joué la comédie, c’est bien certainement dans ce moment-là, — je lisais des yeux, et de l’air le plus convaincu du monde, la musique, et tu sais si j’ai jamais rien compris à ce grimoire…

Blanche leva vers moi ses beaux yeux un peu humides, en rougissant. Mais mon regard inflexible lui répéta encore : Je vous en prie.