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Grand'maman en bonne fortune.

— Vous n’aurez pas beaucoup de monde, garçon, sans doute, dit le comte ; nous retenons ce salon.

Je ne pus guère m’empêcher de rougir, mais j’éprouvais un vrai plaisir à ce trouble.

— Vous oubliez que nous n’avons plus nos estomacs de vingt ans, mon ami, lui dis-je en l’entendant commander un vrai festin.

— Bah ! — Au mois de mai, tout a vingt ans, comtesse, et que diable ! nous ne sommes pas centenaires.

Je dois avouer que les commencements de ce dîner furent assez froids ; j’étais bien un peu dépaysée dans ce restaurant, mais il mettait tant d’aisance dans tout ce qu’il faisait que je finis par reprendre mon aplomb.

— Comme autrefois, comtesse, me dit-il en me montrant un coin de la nappe où se trouvait brodé un petit berceau, nous aurions souri de ceci, que nous aurions pris pour un heureux présage.

Vers le dessert, le comte fit apporter du champagne, et nous nous mîmes à causer souvenirs.

— Vous souvient-il, me dit-il en versant dans ma coupe un doigt de vin mousseux ; vous souvient-il de notre premier souper fin, comtesse, alors que, toute