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On voit par ces vers que les clercs, par suite de longues études, faisaient usage de la langue latine, soit dans le cloître, soit dans les hymnes qu’ils adressaient à Dieu, et que le parler vulgaire, celui des chevaliers, des bourgeois et des manants, était le wallon.

Cet idiome a laissé dans tous les âges des vestiges de son passage. Il éclate surtout dans les parades des jongleurs, dans les cantilènes, dans les chansons de gestes, dans les vies de saints, dans les cris de guerre jetés sur le champ de bataille.

C’est du temps de Notger qu’un jongleur paraît à Liége pour la première fois[1] : il était accompagné d’un grand ours, qui émerveilla les Liégeois par ses tours surprenants et ses danses grotesques, exécutées au commandement de son maître, nommé Gonderan. Il fit d’assez fortes recettes avec sa jonglerie, comme dit un chroniqueur[2], pour pouvoir fonder un petit hôpital.

  1. Nos chroniques disent que le jongleur Gonderan, originaire de St.-Gilles, ville du Languedoc, arriva à Liége en 968. — La Gallia Christiana, t. III, page 1008, fixe son arrivée vers l’an 976. — M. Van Hasselt ne fait apparaître un jongleur à Liége qu’en 1071, et c’est erronément, comme on le voit. Voyez son Essai sur l’hist. de la poésie française en Belgique, p. 5.
  2. Hubert Depas, qui compilait en 1490. — Mohy du Rondchamps en parle ainsi dans son Cabinet historial p. 47 : « Gonderan, menestrier-batleur, estoit venu du pays de Provence à Liége, où il amassa des grands moyens par la dextérité de son art. Ayant depuis perdu sa femme, il quitta le monde (ab arte histrionica reversus, dit la Gallia Christiana), et alla faire pénitence en lieu de Publemont, où il fit dresser un petit oratoire dédié à St.-Giel. L’évesque Alberon ordonna depuis que tous les