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LE SORCIER DE L’ISLE D’ANTICOSTI


I

Dans les premiers jours de septembre 1852, je m’embarquais sur la « Doris », afin de visiter, pour la première fois, les côtes désertes et inhospitalières de l’île d’Anticosti. Peu élevée, bordée de récifs et souvent couverte de brumes épaisses, cette terre est fort dangereuse pour les bâtiments qui entrent dans le fleuve Saint-Laurent ou qui en sortent. L’automne et le printemps, les vents soufflent avec une extrême violence sur la mer voisine ; aussi de nombreux naufrages ont rendu tristement célèbre le nom de l’île d’Anticosti.

Autrefois, quand un vaisseau venait se briser à la côte, les hommes de l’équipage, qui n’étaient pas engloutis par les flots ou broyés par les rochers, étaient condamnés à périr de faim et de froid, sans pouvoir espérer de secours. Les sinistres de ce genre devenaient si fréquents et si désastreux, à mesure que le commerce du pays s’étendait au dehors, que la législature du Bas-Canada dut s’occuper de les prévenir, ou du moins de venir en aide aux matelots naufragés. Depuis quinze à vingt ans, deux phares ont été bâtis sur la côte méridionale d’Anticosti, par les soins du gouvernement provincial. Ils sont à trente lieues l’un de l’autre ; le premier s’élève sur la pointe est de l’île, et le second sur la pointe sud-ouest. Ce sont des tours de soixante-dix à quatre-vingts pieds de hauteur, couronnées par un fanal monstre, dont la lumière sert à signaler aux navigateurs deux des points les plus dangereux de l’île. Chacun de ces phares est à cinq ou six étages ; l’appartement le plus rapproché du fanal renferme