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D’avoir bonne maison, des fêtes, grands repas,
Table ouverte aussitôt, vins et mets délicats.
Les élégans à l’envi lui donnèrent
L’exemple du jargon, des modes, des beaux airs :
Leurs nouveaux goûts aux siens étant contraires,
Il ne saisit que leurs travers,
Croyant imiter leurs manières.
Les cartes et les dés, lui disoient les joueurs,
Sont le doux passe-temps des riches, des seigneurs :
Société sans jeu devient triste, importune :
L’innocent par le gain d’abord on amorça ;
Une Laïs, charmante brune,
Convoitant ses trésors, d’un coup d’œil l’agaça
Et commença
De ce pauvre homme l’infortune :
Et son meilleur ami, d’une trempe commune,
Qu’on rencontre, hélas ! trop souvent,
Lui gagne au jeu terre, contrats, argent.
Mon homme, tout en pleurs, revient à son village,
Et dit, en regrettant sa maison et ses champs :
Quoi ! j’ai passé deux de mes plus beaux ans
À perdre mon bonheur, mes mœurs, mon héritage !
Ne suivant que mes goûts j’étois heureux et sage ;
Et me voilà malheureux aujourd’hui !
Maudit soit le fatal usage
Qui nous fait imiter tous les vices d’autrui !