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V
PRÉFACE

s’occupe de choses vraiment importantes, c’est avec tant d’indifférence et de laisser-aller que personne ne s’en inquiète. Point d’idées dans la tête, point d’énergie dans le cœur, point d’amour de la vérité, point de principe d’action, voilà ce qui constitue aujourd’hui le savant recommandable, honorable et honoré. Un savant d’un caractère décidé, d’un amour incorruptible pour le vrai, qui, par conséquent, frappe là où il faut et cherche à extirper le mal par la racine, un tel savant n’est plus un savant, — Dieu nous en préserve, — c’est un hérostat ! À la potence donc ou du moins au pilori ! Au pilori plutôt ! car la mort par la potence est en désaccord avec les principes du, droit politique chrétien ; c’est une mort impolitique, antichrétienne, parce que c’est une mort visible, indéniable. Mais la mort au pilori, la mort civile, voilà une mort qui convient à la politique et à la religion, une mort perfide, hypocrite, une mort qui n’en paraît pas une. — Apparence toujours, mensonge, masque, pur masque est le caractère du temps présent dans tous les points tant soit peu chatouilleux.

Rien d’étonnant donc que l’essence du vrai christianisme ait causé un tel scandale sous le règne d’un christianisme apparent, illusoire, tout en parole et rien en action, tellement en dehors des idées et des mœurs, que ses représentants lettrés et officiels ne savent plus ou ne veulent plus seulement savoir ce qu’il signifie. Que l’on compare, pour s’en convaincre par ses propres yeux, les reproches que m’ont faits les