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PRÉFACE.

sans les appuyer ni les combattre. Il s’efface lui-même avec trop de modestie ou de prudence.

Nul n’était plus propre à comprendre et à satisfaire les légitimes exigences de la critique moderne que l’éminent auteur des Études sur la Renaissance. Sous la plume brillante de M. D. Nisard, la physionomie d’Érasme, endormie et presque éteinte chez ses premiers biographes, reprend une vie qu’on ne lui soupçonnait plus : on revoit cet œil fin et curieux, ces lèvres rieuses et prudentes que le vigoureux pinceau d’Holbein avait si vivement marquées. Ajoutons que dans cette belle étude ce n’est pas seulement l’éclat des couleurs, mais la vérité du portrait qui nous frappe. On y retrouve à un rare degré les qualités ordinaires de M. Nisard, sa pénétrante sagacité, sa fine connaissance du cœur humain, et aussi cette bienveillance, qui est une partie de la justice quand on parle d’hommes longtemps mêlés aux agitations d’une époque si troublée, qu’on veut entrer dans le secret de leur conduite, expliquer leurs contradictions apparentes ou réelles, sans triompher de leurs faiblesses. D’une main légère et ferme à la fois, M. Nisard a fixé les vraies lignes que les nouveaux critiques d’Érasme devront craindre de forcer d’un côté ou de l’autre, s’ils ne veulent être accusés de porter dans l’étude de leur modèle un parti pris d’admiration aveugle ou de prévention hostile.

Est-ce à dire que le sujet soit épuisé ? M. Nisard serait le premier à repousser un éloge aussi banal. Le brillant