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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

taient sa belliqueuse ardeur. Ce n’était plus le temps où le roi chevalier ne rêvait qu’actions d’éclat et batailles, plein de confiance dans sa destinée et dans l’avenir. François Ier, vieilli et découragé par des infirmités précoces, n’appréhendait plus guère que des malheurs au souvenir de ceux qui l’avaient déjà frappé. Il avait donc prescrit à son lieutenant d’éviter toute action décisive, et pour faire révoquer cette décision qui enchaînait son courage et celui de ses troupes, le comte d’Enghien envoya Montluc à Paris.

Certes il ne pouvait choisir un plus digne avocat d’une telle cause, ni qui la plaidât avec plus d’ardeur ; et cette députation nous a valu l’une des pages les plus vives et les plus attachantes qui figurent dans nos anciens mémoires. C’est au début du deuxième livre qu’il faut lire ce passage, animé d’un souffle tout militaire. Il faut y voir comment ce simple capitaine, beaucoup plus connu dans les camps qu’à la cour, arracha par la force de sa conviction et l’élan de ses paroles, au roi et aux principaux de l’État, presque tous opposés à son avis, une permission de combattre qui donna une victoire de plus à la France.

Rappelons donc en quelques mots cette scène pittoresque, qui est tracée dans l’original avec une singulière énergie. Ce triomphe, remporté par la fière assurance de l’homme de guerre et par une éloquence toute martiale, a quelque chose d’antique. On se croirait transporté dans une assemblée publique de Rome ou d’Athènes. Mais auparavant qu’on nous permette une remarque : ce tableau si vivement coloré,