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GUILLAUME BUDÉ.

Ajoutons, à son honneur, qu’il mit au service de cette idée une foi aussi désintéressée que sincère. Supérieur au désir même de la réputation, le dernier dont se dépouille le savant, il tenait moins à ses propres succès qu’à ceux des nobles études dont il s’était fait l’ardent apologiste et le promoteur infatigable. Jamais ses conseils, jamais ses encouragements ne manquèrent à ceux qui avaient pour titre auprès de lui l’amour du grec. Mais, par cet ardent prosélytisme, que se proposa Budé ? Non pas tout à fait de régénérer la société : ces mots sont un peu trop de notre époque, et ses prétentions étaient moins hautes. Il voulait apprendre et enseigner à bien écrire ; cultiver la bonne philologie, et en répandre le goût. Au seizième siècle, c’était beaucoup ; au dix-neuvième, où les grandes théories sont en faveur, on veut davantage. À son insu, M. Rebitté a transporté Budé dans notre siècle, et a substitué trop à la pensée et au tour d’esprit de son temps les idées et les intentions qui sont du nôtre. Considérée dans sa simplicité, cette figure, qui n’a rien de celles de nos jours, n’eût rien perdu de son relief, et même elle n’en eût été que plus originale.

Hâtons-nous, du reste, de reconnaître que l’influence des ouvrages de Budé fut grande sur ses contemporains. Elle introduisit dans l’éducation plusieurs réformes utiles, que les meilleurs esprits furent les premiers à accueillir. Muret, dans l’enthousiasme de sa reconnaissance, ne craignait pas d’appeler providentiel et divin le bonheur qu’il avait eu de rencontrer quelques écrits de Budé : en lui ouvrant les yeux,