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PIERRE RAMUS.

l’algèbre ; et il n’est pas jusqu’à la théologie qu’il n’ait abordée, puisqu’il a laissé un commentaire sur la religion chrétienne[1].

On ne saurait nier, d’ailleurs, que Ramus n’ait fait preuve d’une puissance et d’une étendue d’esprit analogues aux sujets qu’il embrassa. Mais ce qu’il reste à envisager finalement en lui, c’est le philosophe. À ce titre, celui que quelques-uns ont nommé le Descartes du seizième siècle mérite encore, par sa Dialectique et ses Remarques déjà citées[2], une place avantageuse dans l’histoire de la philosophie ; et l’on peut, en lui appliquant un trait de l’éloge consacré par le P. Guénard à l’auteur du Discours de la méthode, le compter, à quelques égards, « parmi les hommes qui n’ont pensé d’après personne et qui ont fait penser d’après eux le genre humain, qu’on voit seuls et la tête levée marcher sur les hauteurs, tout le reste des philosophes suivant comme un troupeau. »

Par la double vigueur de l’intelligence et du caractère, Ramus marcha en effet avant Descartes (c’est là sa plus belle gloire) à la conquête de la vérité. À des hommes tels que lui, qui s’ouvrent des voies nouvelles semées d’aspérités et de périls, comment ne pas pardonner les chutes ? Cette indulgence, qui n’est qu’équitable, ne sera pas refusée à Ramus. Sans doute il a été lui-même injuste envers Aristote, lorsqu’il lui em-

  1. En quatre livres. — Un des livres traite de la Foi, un autre de la Prière, etc.
  2. Institutiones dialecticæ III libris distinctæ. — Animadversiones in dialecticam Aristotelis.