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MADELEINE NEVEU ET CATHERINE DES ROCHES

prit, froidement quintessencié, qui florissait alors en Italie. Plusieurs autres sont philosophiques et d’un plus grand intérêt. Dans des espèces de scènes allégoriques, on voit d’abord converser la Vieillesse et la Jeunesse, qui disputent de leurs avantages. Après s’être exaltée en dépréciant sa rivale, qui lui rend la pareille, la Vieillesse finit toutefois par convenir, sans trop de peine, de ses inconvénients et de ses disgrâces. Dans les propos qui s’échangent, l’auteur a reproduit quelque chose de l’agrément que l’antiquité savait mêler à ce genre. C’est ensuite la Fortune qui, dans une assez longue discussion avec la Vertu, prétend contester sa prééminence, jusqu’à ce qu’elle lui déclare « que la douceur de son langage l’a si bien gagnée, qu’elle voudrait n’être jamais séparée d’elle. » Plus loin, trois parties du corps humain, la main, le pied et la bouche, exposent tour à tour leurs services, non sans récriminer et sans gémir sur leur sort. La main, par exemple, se plaint d’être nue, tandis que ce vilain pied est si bien couvert. Leur sage conclusion est cependant qu’il vaut mieux cesser leurs débats et vivre, pour s’entr’aider, en bonne intelligence. Enfin mademoiselle des Roches fait converser deux ennemies de l’homme, la Pauvreté avec la Faim, et une peinture expressive du temps se montre dans ce dialogue, où l’on remarque ces paroles de la Faim, annonçant qu’elle retourne dans ses logis ordinaires : « Je m’en vais chez les paysans du Poitou ; il semble qu’ils vivent de faim comme les autres en meurent : depuis que la guerre m’y mena, je n’en ai guère bougé. » Témoignage trop