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ANNE DE MARQUETS

pital[1]. L’aînée, Camille, était surtout en renom, ce dont le P. Hilarion de Coste nous a laissé une singulière preuve, en disant « qu’il l’aurait louée bien volontiers si elle n’était pas morte hors de la vraie Église[2]. » Elle méritait cependant de l’être, outre ses vers, par l’étendue de son savoir, car elle possédait à fond les langues latine, grecque, italienne, espagnole, et par son extrême modestie, qui lui fit redouter pour ses œuvres le grand jour de la publicité. Ajoutons, à son éloge, que sa meilleure pièce fut celle qu’elle consacra, en 1583, à la mémoire de son père.

Mais ce n’était pas seulement dans le monde que l’on cultivait la poésie. Elle était en honneur jusque dans les couvents, et la religieuse Anne de Marquets a son rang parmi nos femmes poëtes. Bien qu’elle appartînt par sa naissance au comté d’Eu, qui faisait partie du Vexin français, on peut la placer au nombre des Parisiennes, puisque sa vie se passa et que ses ouvrages furent composés aux portes de Paris. Issue d’une famille noble, elle trouva dans le monastère de Poissy, à défaut d’établissement que lui eût offert un mariage digne d’elle, cet asile qui demeurait toujours ouvert aux jeunes filles de qualité, et qui n’excluait, en somme,

  1. Voyez Hospitalii Carmina, p. 432 de l’édition d’Amsterdam, in-8o, 1732.
  2. Éloges et Vies des dames illustres, in-4o, 1630, p. 403. — Sainte-Marthe lui a consacré une pièce de vers latins dont voici le début :
    Rara tui sexus et nostri rarior ævi
    Gloria, quas olim ductore parente camœnas
    Nosse datum, aerii juga dum celsissima Pindi,
    Vix paucis adeunda viris, ascendere virgo
    Non dubitas, sacrasque manu decerpere lauros, etc.