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JACQUELINE DE MIREMONT.

devenue aveugle, et Gilles Durant, l’un des littérateurs les plus en crédit, l’un de ceux qui jouèrent dans la Ligue le rôle le plus efficace et le plus français, faisait ainsi, dans son épitaphe, allusion à cette circonstance :


Le jour lui refusa sa clarté coutumière,
Ingrat, ne daignant plus s’épandre sur ses yeux ;
Mais elle par dépit s’envola dans les cieux,
Laissant le monde veuf de sa belle lumière.


Déjà Ronsard, dans un de ses sonnets, avait jadis salué cette fleur nouvelle qui apparaissait à ses yeux, et aux suffrages de ce juge sans appel s’étaient joints, entre beaucoup d’autres, ceux de d’Aurat et de Scévole de Sainte-Marthe. Tel fut l’éclat de cette existence vouée aux lettres tout autant qu’à la prière, témoignage frappant du mouvement général qui, dans cette période féconde, emportait les esprits, non sans faux pas et sans chutes, vers un avenir certain de progrès. L’amour de l’étude avait pénétré partout, et, comme le silence du cloître, le tumulte des camps n’avait pu fermer accès à cette pacifique invasion. Mais, sous l’influence des querelles et des guerres de religion, les sujets qu’on s’appliquait à traiter rentraient le plus souvent dans les idées qui dominaient la société, je veux dire le cercle d’aspirations pieuses où s’était renfermée Anne de Marquets, où devait se renfermer aussi Jacqueline de Miremont, l’une des femmes poètes qui ont le plus honoré Paris.

Nous savons par Guillaume Colletet que sa vie s’écoula, vers la fin du seizième siècle, dans cette ville, dont elle