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Page:Feydeau - La Puce à l’oreille, 1910.djvu/48

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RAYMONDE.

Celui que je t’ai dit qui a failli être mon amant.

LUCIENNE.

Ah ! oui. Eh bien, ça va des mieux ! Tu vas voir. (Écrivant.) « Monsieur, je vous ai vu l’autre soir au théâtre du Palais-Royal… »

RAYMONDE, avec une moue.

Oui !… Tu ne trouves pas ça bien froid pour un coup de foudre ?

LUCIENNE.

Bien froid ?

RAYMONDE.

On dirait un constat d’huissier. Je ne sais pas, moi, il me semble que j’aurais écrit, brutalement, là : « Je suis celle qui ne vous a pas quitté des yeux l’autre soir, au Palais-Royal. » et pas de « monsieur » ; rien ! v’lan ! aïe donc !

LUCIENNE.

Eh ! mais, dis donc ! mais tu as la vocation, toi.

RAYMONDE, modeste.

Mon Dieu, je dis comme il me semble que j’écrirais…

LUCIENNE.

Bien, oui, nous sommes d’accord. (Elle retire du cahier de papier à lettres la feuille commencée qu’elle laisse sur le pupitre et écrivant immédiatement sur la nouvelle feuille de papier.) « Je suis celle qui ne vous a pas quitté des yeux… »