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Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 1, 1948.djvu/178

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Charançon. — Jocrisse ! Je te demande un peu à quoi me serviraient les glaces de ton miroitier dans une partie fine ?

Samuel. — C’est ce que j’ai pensé ! Mais enfin, je me suis dit : il y aura des dames… et aujourd’hui, on est si dévergondé !

Charançon. — Qu’est-ce à dire, monsieur ? Vous oubliez que vous parlez à votre maître ?… un homme marié !

Samuel. — Je me serais gardé de le rappeler à monsieur dans cette circonstance.

On sonne.

Charançon, gagnant la droite. — Ce doit être ce bon Gratin qui revient avec le homard.

Samuel, il se dirige vers le fond à gauche. — Oui, ce doit être ce bon Gratin.

Charançon. — Eh bien… dis donc, tu es familier !…

Scène III

Charançon, Samuel, Gratin

Gratin, entrant avant que Samuel ait eu le temps de sortir, il tient un paquet à la main. — Mes amis, vous aviez laissé la clé sur la porte !

Samuel. — Non, c’est le concierge.

Gratin remet la clé à Samuel.

Charançon, à Samuel. — Tiens ! va toujours préparer les couverts à la cuisine.

Samuel — C’est ça !

Il sort par la porte, 2e plan.

Gratin, dépliant le paquet dans lequel est un homard. — Voilà le homard demandé !

Charançon. — Eh bien, tu y as mis le temps !

Gratin. — J’ai dû aller aux Halles ! L’épicier d’à côté m’en a montré un pas beaucoup plus gros que ça, il en voulait huit francs, c’était exorbitant ! Celui-là, là-bas, six francs !

Charançon, se fouillant, — Alors, c’est six francs que je te dois ?

Gratin. — Ah ! non ! deux francs de voiture pour aller, deux francs pour revenir, ça fait dix francs.

Charançon. — Eh bien, tu aurais mieux fait de prendre le plus gros pour huit francs.

Gratin. — Ah ! que c’est bête ! Je n’y ai pas pensé !

Samuel, passant la tête par la porte de l’office : — Oùs qu’est le légumier ?

Charançon. — Est-ce que je sais, moi, sans doute avec les assiettes.

Samuel. — Et les assiettes ?

Gratin. — Eh bien, avec le légumier !

Samuel. — Merci ! Eh bien, le premier que je rencontrerai me dira où sont les autres.

Il disparaît.

Gratin. — Voyons ! Tu as tout ce qu’il faut pour ton déjeuner ?

Charançon. — Oui ! ah ! sapristi ! et la mayonnaise pour le homard ! Tu sais faire la mayonnaise, toi ?