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Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 1, 1948.djvu/205

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Le Greffier. — Chut !

Charançon, à Édouard. — Hein ! dis donc ! Je crois que j’ai été assez brillant.

Le Président, à l’huissier. — Voyez si la prévenue est en état de comparaître.

L’Huissier, de la porte du fond à droite. — Dans un instant, monsieur le Président !

Le Président. — L’audience ne peut pourtant pas rester en suspens. (À Édouard et Caponot qui se lèvent ainsi que Charançon.) Levez-vous ! (Lisant la sentence.) "Attendu qu’il est établi que le nommé Caponot a, sans motif valable, cité à comparaître en police correctionnelle la dame Édouard, l’accusant de s’être rendue coupable de voies de fait sur sa personne sans que le fait puisse être prouvé, que le même Caponot s’est en outre fait représenter par son frère, Alphonse Caponot, dont la mauvaise tenue à l’audience a constitué un manque de respect à la magistrature, le tribunal, faisant application des articles 209 et 221 du code pénal, condamne Alphonse Caponot (Caponot relève la tête, ahuri.) à cinquante francs d’amende et aux dépens…

Applaudissements dans la salle.

Caponot, à la foule, après un temps de réflexion. — Ah, çà ! Qui est-ce qui est condamné ?

La foule. — Vous !

Caponot. — Moi ! Ah ! elle est forte !

Il sort précipitamment par la droite en bousculant le garde.

Le Président, se levant ainsi que les autres juges. — L’audience est levée.

Le public s’écoule en partie.

L’Huissier, ouvrant la porte du fond à droite. — Voici la prévenue.

Charançon. — Ah ! bien ! je suis curieux de la voir, par exemple.

Édouard. — Oh ! la la la la.

Gabrielle paraît la tête basse.

Charançon, tombant sur son banc. — Ma femme !

Édouard et Gabrielle. — Nous sommes perdus !

Miranda. — Oh ! là, ça se complique !

Charançon, courant au tribunal. — Monsieur le Président, je demande à recommencer !

Le Président. — Hein ! mais la cause est entendue, maître.

Charançon, allant à la barre. — Ça ne fait rien. (Plaidant.) Oui, messieurs, je demande la condamnation d’une femme indigne dont la conduite…

Le Président. — Mais je vous répète, maître, que l’audience est levée…

Charançon. — Mais puisque je vous dis que je demande à recommencer.

Gabrielle, affolée. — Oh ! Dieu ! Édouard !

Miranda. — J’ai tout compris, madame, je vais vous sauver !…

Elle passe de façon à se trouver face à face avec Charançon quand il se retournera.

Édouard et Gabrielle. — Qu’est-ce qu’elle dit ?