Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 2, 1948.djvu/107

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Ribadier. — Comment, pas plus tard que demain !…

Thommereux. — C’est tout ce que tu as à me dire ?

Ribadier. — Non ! Voici encore une lettre…

Thommereux, à part. — Encore ! Il me prend pour le facteur, alors !

Ribadier, se levant. — Une lettre pour le président de mon Cercle ! C’est lui qui sera mon second témoin.

Thommereux, se levant. — Ah !

Ribadier. — Oui ! Il est un peu gâteux… mais enfin, tu sais, il est président ! tu vas me faire le plaisir d’aller le trouver…

Thommereux. — Mais s’il est gâteux ?…

Ribadier. — Eh bien, tu t’entendras avec lui pour ce qu’il y a à faire. Je vous confie mes intérêts.

Thommereux. — C’est entendu ! J’y cours !

Ribadier, lugubre. — Et pour le reste, à la grâce de Dieu !

Thommereux. — À la grâce de Dieu !… ffue ! ffue ! flue ffue ! ffue ! ffue ! ffue !

Il sort en sifflotant par le fond.

Scène 2

Ribadier, puis Sophie

Ribadier, seul. — Comment, il siffle ! Eh ! bien, en voilà un témoin qui a une façon de comprendre sa mission ! Oh ! ce duel ! Ce qu’il m’embête ! (Il gagne la droite. Sophie entre par le fond.) Ah ! Sophie !

Sophie. — Monsieur ?

Ribadier. — Il n’est pas encore venu deux messieurs en noir me demander ?

Sophie. — En noir ?… Si, monsieur ! Il est venu le charbonnier !

Ribadier. — Ce n’est pas ça ! J’attends deux messieurs ! Deux témoins !

Sophie. — Monsieur marie quelqu’un ?

Ribadier. — Non, Sophie ! Ma pauvre Sophie ! Ce sont les témoins de mon adversaire ! Je me bats !

Sophie, éclatant. — Monsieur se bat ! Ah ! Ah ! Ah ! Que c’est drôle !

Ribadier, vexé — Je ne vois pas qu’il y ait de quoi rire !

Sophie. — Ah ! C’est que je ne vois pas Monsieur se battant !

Ribadier. — Oui, eh bien, je ne vous demande pas de me voir ! Si ces messieurs venaient, vous me préviendrez.

Il remonte à droite.

Sophie. — Oui, Monsieur, oui !

Ribadier. — C’est curieux comme on prend gaîment parti de mon duel, ici !

Il rentre à droite, deuxième plan.

Scène 3

Sophie, puis Angèle

Sophie. — Il va se battre ! Moi, ça me fait toujours rire quand j’entends dire : "Il va se battre". Je trouve ça si bête !

Angèle, entrant de gauche, premier plan. — Ah ! Sophie ! Monsieur n’est pas encore sorti de sa chambre ?