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Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 2, 1948.djvu/112

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Savinet. — Ah ! non ! non ! Je veux encore bien l’être, mais au moins, à l’œil !

Angèle, allant s’asseoir dans le fauteuil. — Et après tout, c’est votre affaire !…

Savinet, remontant à droite de la table et prenant son chapeau. — Oui. Du reste, je vais aller trouver Théthé…

Angèle. — Théthé ?…

Savinet. — Ma femme.

Angèle. — Ah ! oui ! Réré pour mon mari…

Savinet. — Réré pour lui, Théthé pour moi… Je vais aller trouver Théthé et j’aurai une explication avec elle ! Vous direz à cet excellent Ribadier que je regrette beaucoup, mais que je ne peux pas l’attendre plus longtemps…

Angèle. — Soit ! Je lui ferai dire.

Savinet. — S’il vous plaît ! Allons, au revoir, madame ! Et maintenant, il faudra bien que ma femme me donne de bonnes raisons ! (À part, en s’en allant.) Non, il n’y a pas, les fonds argentins faisaient hier trois cent cinquante-sept ! Je ne peux pas vendre à ce prix-là !

Il sort par le fond.

Scène 6

Angèle, puis Ribadier

Angèle, seule. — Oui, va, elle t’en donnera de bonnes raisons et même si elles ne sont pas bonnes, tu sauras les trouver telles… (Se levant.) Et voilà les hommes, tenez ! Heureusement nous ne sommes pas comme cela, nous autres femmes, et monsieur Ribadier pourra bien me donner toutes les bonnes raisons qu’il voudra. (Près du fauteuil.) Ah ! Ah ! Vous m’endormiez ! C’était commode, n’est-ce pas ! Madame gêne ! On l’immobilise et on la range dans un coin. Eh ! Bien, à nous deux ! Je veux que votre bel exploit tourne à votre confusion ! Je vous ménage une… (Entre Ribadier, de droite, deuxième plan.) Lui !… Il arrive bien !

Elle descend à gauche.

Ribadier, à part. — Ma femme ! (Haut.) Pardonnez-moi, madame, Sophie m’avait dit qu’un monsieur m’attendait ici.

Angèle. — Eh ! Monsieur, ne nous occupons pas de la personne qui était ici. Elle n’a pu vous attendre et elle est partie… J’ai à vous parler.

Ribadier. — À moi ?

Angèle. — D’une chose des plus graves.

Ribadier, descendant. — Oh ! Madame, je devine tout ce que vous pouvez me dire ! Je reconnais tous mes torts. Vous pourrez donc demander le divorce contre moi !

Angèle. — Eh ! bien, non, monsieur ! Nous ne pouvons pas divorcer ! Il s’est passé des choses si graves que, quelque désir que j’en aie, je ne dois pas divorcer.

Elle s’assied sur le pouf qui je trouve devant la table.

Ribadier. — Que voulez-vous dire ?…

Il s’assied sur le canapé.

Angèle. — Il est bien vrai, n’est-ce pas, que tous les soirs où vous aviez besoin de votre liberté, vous m’endormiez ?