Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 2, 1948.djvu/197

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Gérome. — Bien !

Il remonte et sort.

Lucienne et Mme Pontagnac, ensemble. — Rédillon ! — M. Rédillon !

Rédillon. — Non !

Il entre à droite et s’enferme.

Les deux Femmes, qui se sont précipitées d’un même mouvement instinctif contre la porte par laquelle vient de sortir Rédillon. — Fermée !

Mme Pontagnac, descendant à gauche. — Vous voyez, madame, ce dont vous êtes cause !

Lucienne. — Permettez, madame, c’est vous !

Mme Pontagnac, avec un rire amer. — Ah ! c’est moi ! Vous devriez comprendre pourtant, madame, combien cette démarche m’est déjà pénible !

Lucienne. — Mais croyez-vous donc, madame, que je suis ici par plaisir !

Mme Pontagnac. — Ah ! bien, merci ! si je n’y étais poussée par le devoir de me venger.

Lucienne. — Et moi aussi !

Mme Pontagnac. — Vous ne savez dire que ça : "Et moi aussi !"

Lucienne. — Mais que voulez-vous que je dise, puisque notre situation est la même !

Mme Pontagnac. — Et voilà à quelles compromissions nous réduisent nos maris !

Lucienne. — Ah ! c’est dur pour des honnêtes femmes !

Scène VIII

Les Mêmes, Gérome, puis Pontagnac

Gérome, paraissant au fond. — Madame, il y a là un jeune homme qui demande Mme Vatelin !

Lucienne. — Qui me demande !… un jeune homme !… qui ça ?…

Gérome. — M. Pontagnac !

Mme Pontagnac, qui est remontée à la cheminée à l’entrée de Gérôme. — Mon mari !

Lucienne. — C’est ça que vous appelez un jeune homme ?

Gérome. — Il est jeune pour moi !… Songez, madame, que je devais être déjà majeur quand il était encore à la mamelle.

Mme Pontagnac. — Mais qu’est-ce qu’il veut, mon mari ?

Lucienne. — Je l’ignore ! C’est après moi qu’il demande… Au fait !… il arrive bien ! J’avais besoin d’un vengeur !

Mme Pontagnac. — Hein ! Quoi, vous voudriez ?

Lucienne. — Oh ! ne craignez rien ! Comme ça n’est que pour donner le change à mon mari !

Mme Pontagnac. — Oh ! Alors !

Lucienne. — Me livrez-vous M. Pontagnac ?

Mme Pontagnac. — Soit ! Aussi bien, cela me donnera un grief de plus contre lui !

Lucienne. — C’est bien ! (Prenant le vêtement de Clotilde sur le divan et le lui donnant.) Tenez, madame, entrez là ! (Elle la fait sortir à gauche, 2e plan ; à Gérôme.) Et vous, faites entrer M. Pontagnac !