Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 6, 1948.djvu/85

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Champignol. — Comment t’appelles-tu ?

Saint-Florimond. — Euh… Auguste.

Champignol. — Auguste… quoi ?

Saint-Florimond. — Auguste… Rien ! Enfant naturel !

Champignol. — Ah ! crois que je compatis… Note que ça n’empêche pas d’être quelque chose… Vois, le grand empereur romain : il ne s’appelait qu’Auguste, comme toi… Ça l’a-t-il gêné dans sa carrière ?

Saint-Florimond. — C’est juste.

Champignol, se levant. — Auguste ! Et alors… dis-moi ! ce peintre… hein !… à moi… comment s’appelle-t-il ?

Saint-Florimond, se levant. — Ah ! non ! non ! je ne peux pas !

Champignol, lui donnant le bras. — Allons ! Allons ! voyons… ça me fera plaisir.

Ils reprennent tous les deux leur faction, et descendent bras dessus bras dessous, comme précédemment.

Saint-Florimond. — Oh ! on dit ça…

Champignol. — Voyons, Auguste, ce n’est pas par curiosité, c’est pour savoir si je le connais.

Ils s’arrêtent à l’avant-scène.

Saint-Florimond. — Eh bien ! c’est… c’est Raphaël.

Champignol. — Blagueur ! Il y a plus de trois cents ans qu’il est mort !

Saint-Florimond. — Attendez donc ! vous ne me laissez pas achever : Raphaël Potard.

Champignol. — Raphaël Potard ! c’est drôle ! parmi les peintres… Potard ! non, connais pas !

Saint-Florimond. — Oh ! c’est un tout petit peintre ! tout petit peintre… (Il remonte avec Champignol.) Il avait épousé une mulâtresse… une mulâtresse… qui avait eu des nègres dans sa famille !

Champignol, redescendant. — Naturellement.

Saint-Florimond. — Et alors cette mulâtresse…

Scène XXII

Les Mêmes, Fourrageot

Fourrageot, sortant de la première baraque de droite, au moment où Champignol et Saint-Florimond redescendent en scène en montant leur garde, bras dessus, bras dessous. — Ah çà ! qu’est-ce que c’est que ça ! Qu’est-ce que vous faites-là, vous autres ?

Champignol, Saint-Florimond, s’arrêtant. — Mon Commandant !

Fourrageot. — Où avez-vous vu monter la garde comme ça ? Et puis, présentez donc les armes quand je passe, hein ! Fourrageot passe à gauche, n° 1. Champignol et Saint-Florimond se placent face à face et se présentent les armes.) Pas comme ça ! (Champignol fait demi-tour. Champignol et Saint-Florimond se trouvent alors l’un derrière l’autre, et présentent les armes au commandant dans cette position.) Qui est-ce qui m’a fichu des soldats pareils ? Et puis, pourquoi êtes-vous deux ?

Saint-Florimond. — je ne sais pas, mon Connandant… on nous a dit…

Champignol. — Oui, à Auguste et à moi…