Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 8, 1948.djvu/76

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

des plus hautes sommités de ce siècle ! le plus zélé disciple d’une de nos plus grandes lumières,… de celui qui ose dire tout haut ce que nous pensons tout bas : "Le microbe n’existe pas."

Paginet. — Ah ! monsieur.

Dardillon. — Je sais que vous cherchez un préparateur. Eh bien ! si vous voulez avoir le plus dévoué, le plus assidu de tous, prenez-moi.

Paginet. — Vous ? Mais vous savez que cela demande une certaine expérience ?… Avez-vous déjà pratiqué quelque part ?

Dardillon. — Oh ! mon Dieu, monsieur, je vous avouerai que…

Simone, entrant de gauche. — Oh ! pardon… mon oncle… Je vous croyais seul…

Paginet. — Ça ne fait rien… (Les présentant.) M. Dardillon, ma nièce.

Dardillon, saluant comme s’il ne connaissait pas. — Mademoiselle,… enchanté.

Simone. — Monsieur Dardillon ?… Est-ce que vous seriez le fameux préparateur ?…

Dardillon. — Hein ! moi ?… (Avec aplomb.) Oui… oui.

Paginet. Comment ?

Simone. Oh ! monsieur, mais il n’a été question que de vous dans les journaux, tous ces temps-ci !

Paginet. — Il a été question de lui ?

Dardillon. modeste. — Oh ! oh !

Simone. — C’est monsieur… (À Paginet.) Vous n’avez pas lu dans le journal ?

Paginet. — Non ! non !

Simone. — C’est monsieur auquel Pasteur a offert tout ce qu’il voudrait s’il consentait à entrer chez lui comme préparateur.

Paginet. — Allons donc ! Et vous avez refusé ?

Dardillon. — Parbleu !

Simone. — Et il a répondu cette phrase désormais célèbre : "je ne croirai aux microbes que quand je les aurai vus à l’œil nu."

Paginet. — Vous avez dit ça ?

Dardillon. — Il parait !… (À part.) Elle a un toupet !

Paginet. — Eh bien ! ma nièce, tu ne le croirais pas ? Eh bien ! monsieur… monsieur qui a envoyé promener les offres de Pasteur…. vient me demander d’entrer chez moi.

Simone. — Lui !… Ah ! mon oncle, quel honneur !

Paginet, à Dardillon lui serrant les mains. — Ah ! monsieur !

Simone, id. — Ah ! monsieur !

Dardillon. — Il n’y a pas de quoi ! il n’y a pas de quoi !

Scène VI

Les Mêmes, Joseph, puis Madame Paginet et Plumarel

Joseph paraît au fond, un palmier dans les bras.

Paginet. — Qu’est-ce que c’est que ça ?

Joseph. — C’est madame qui rentre avec M. Plumarel, un palmier et des fleurs.

Dardillon, à Joseph. — Oh ! oh ! vous êtes chargé !

Joseph. — Tiens ! vous n’êtes donc plus malade ?

Dardillon. — Non, je suis préparateur.