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— Voudriez-vous fixer la date du baptême de Richard, mon ami ?

Paul Domanet s’était montré fort heureux de posséder un fils. Durant quelques jours il avait fait preuve d’une certaine aménité qui avait côtoyé la douceur.

Denise espérait donc le fléchir et qui sait ? l’amener à plus de douceur dans le caractère.

— Le baptême !… cria Domanet… mon fils ne sera pas baptisé… Je ne veux pas de cérémonie religieuse… À vingt-et-un ans, Richard choisira une religion s’il le désire.

La pauvre Denise regarda son mari avec des yeux d’hallucinée.

Elle ne parvenait pas à concevoir une pareille mentalité.

Elle bégaya, épouvantée par l’homme qui la bravait :

— Vous ne voulez pas que notre fils soit baptisé ? vous prenez la responsabilité d’un pareil acte ?

— J’ose prendre toutes les responsabilités… Il la laissa en riant.

Denise retomba presque évanouie sur la chaise-longue où elle était étendue.

Heureusement pour elle, sa garde-malade lui était dévouée.

Elle vit Mme Domanet dans un tel état qu’elle craignit pour ses jours. Elle jugeait très sévèrement la conduite de ce mari sans égards, sans foi, sans frein dans ses brusqueries.

Elle murmura donc un jour dans l’oreille de Denise :

— Ne vous tourmentez pas, Madame… je vais aller expliquer votre cas à M. le curé de la paroisse… puis, un après-midi, j’irai promener votre bébé et je le ferai baptiser… fiez-vous à moi.

Denise eut une détente qui la soulagea. Elle serra les mains de la bonne chrétienne qui la rassurait ainsi et la laissa faire.

Cependant, elle tremblait que son mari ne découvrît cette ruse. Mais, grâce à l’adresse de la garde-malade, tout se passa admirablement.

À partir de ce jour, la gaîté reparut chez la jeune mère. Elle parut accepter avec plus d’indifférence les boutades de son mari.