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ÉPREUVES MATERNELLES

ses ? Je voudrais tant vivre un peu tranquille. Vous souriez… vous avez l’air changée… que se passe-t-il ?

Denise répondit avec un rire affectueux en prenant la main de Rose, sa petite compagne des mauvais jours.

— Mon cœur n’a pas changé, petite Rose, mais il est temps que je vous raconte ma vie. M. Domanet est mon mari et voici mes enfants.

— Quoi, vous avez trouvé à vous marier avec un riche monsieur ?

— Mais oui, gentille Rose, mais il y a longtemps de cela. J’étais déjà Madame Domanet quand je faisais la cuisine chez Mme Pradon.

La pauvre Rose ne savait plus que penser devant une semblable révélation. Elle recula de deux pas, toute rouge d’avoir traité Mme Domanet aussi familièrement.

— C’est triste, dit-elle, de m’avoir trompée. Je croyais avoir trouvé une bonne place près de vous et c’est… c’est fini…

La jeune fille éclata en pleurs désespérés.

— Ma petite Rose, ne soyez pas désolée, vous resterez près de moi toujours, vous serez à mon service, une vie douce va commencer pour vous.

— Est-ce vrai ? vous voulez bien me garder ? Que je suis heureuse !

Le rire de Rose remplaça ses larmes

— J’ai dit au revoir à Mme Pradon, mais j’irai chez elle pour lui parler de vous. Je serai bien contente de lui annoncer qui vous êtes, elle qui croyait que vous vouliez faire du mal à ses enfants !

— Laissez cela, petite Rose… la vérité éclatera de soi-même.

— Non… je veux avoir le plaisir d’étonner mon ancienne patronne.

Gaiement, Rose prit son service, mais elle remplaça son ton familier par une déférence pleine d’affection. Elle admirait sa maîtresse qui avait supporté tant d’infortune avec une aussi grande noblesse. Elle sut voir, plus profondément encore, de quelle valeur était l’âme de celle qui lui avait toujours été indulgente.

Elle fut vite à l’aise dans l’hôtel et devint une aide précieuse pour les enfants auxquels elle se dé-