porterait préjudice… Je suis dans une perplexité terrible…
— Comme vous vous embarrassez de questions secondaires, ma pauvre enfant… Paul exagère. En quoi voulez-vous que cela nuise à ses intérêts que vous écriviez à votre frère ?… c’est du parti pris… c’est enfantin d’émettre des idées pareilles.
Denise restait indécise. Laisserait-elle son malheureux frère sous le coup de la lettre dictée par son mari. C’était l’anéantissement de toute leur affection fraternelle. Sans doute trouvait-il déjà que ses sentiments s’étaient bien modifiés et que la richesse lui durcissait le cœur.
Elle murmura :
— Si je savais…
— Osez, chère Denise, et comme on n’est jamais sûr des domestiques, je mettrai moi-même la lettre à la poste.
Cette proposition aurait pu réveiller la méfiance de Denise, mais vaincue par les paroles et les protestations de dévouement de Mme Zode, elle se décida à tenter l’aventure.
Qui sait si cette dame n’avait pas fait volte-face écœurée des procédés de son cousin ? Elle était sans doute émue par le chagrin qu’elle lui voyait et devenait une alliée.
Mme Zode, remarquant le trouble de Denise, endormait ses dernières méfiances en insistant sur le côté brutal du caractère de Paul. Elle racontait des incidents de sa jeunesse où il faisait preuve déjà d’un despotisme sans entrailles.
Elle était sincère en le dénonçant ainsi, car elle le trouvait odieux, mais comme il l’indemnisait largement, elle le considérait comme un maître à qui il valait mieux obéir.
En son for intérieur, elle trouvait Denise assez à plaindre, mais elle était, elle aussi, de ces personnes non sentimentales et dégagées de scrupules, qui n’admettaient pas la faiblesse.
Elle se disait : tant pis pour elle !
Les vaincus avaient toujours tort…
Denise, poussée, écrivit donc sa lettre. Elle la composa non sans larmes, non sans terreur. Elle donna des détails sur sa vie depuis son mariage, ses désillusions où glissait tant de regret ; elle s’accusa de