Page:Fiel - Armelle devant son vainqueur, paru dans l'Ouest-Éclair du 3 septembre au 10 octobre 1937.djvu/33

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— Est-ce que le temps te semblerait long entre ton oncle et moi, ma petite chatte ?

— Oh ! que pensez-vous là, ma bonne tante !

Armelle n’exprimait pas la vérité par affection. Elle commençait par trouver que son existence était monotone.

Elle reprit :

— Vous savez, ma tante, combien je vous chéris tous les deux, mais mon oncle, quand je veux un peu voyager, me répond : ce n’est plus de nos âges, mon enfant, et vous-même, bonne tante, quand je vous demande d’effectuer une course un peu longue, vous vous récriez. Il me semble que mes pieds aimeraient… que j’aimerais… à tout prendre, je ne sais pas ce que j’aimerais !

Armelle s’était arrêtée en voyant les traits de sa tante s’assombrir. Elle eut peur de la tourmenter et elle reprit la conversation sur des sujets moins personnels. L’âge d’Armelle lui permettait d’espérer presque sans espoir. Elle était décidée a passer sa vie sans surprise dans l’hôtel où on l’avait recueillie, mais malgré cet avenir, tremblotait au fond de cette obscurité la flamme magique de l’espérance.

Cependant ses paroles avaient fait du chemin dans l’esprit de sa tante.

Elle se souvint de ses vingt ans et elle évoqua le cercle de jeunesse qui l’entourait. Il y avait Solange. Anne, Edmée, Stéphanie et d’autres. L’on se voyait de château à château, on se donnait rendez-vous l’hiver, aux chasses où leurs pères se rendaient. On se retrouvait à quelque bal que l’une de ces dames donnait pour l’anniversaire d’une de ses filles. Les parents étalent jeunes, la cordialité s’entretenait.