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cinéma !… cinéma !…

— Ah ! prononça de nouveau Claudine, un peu émue.

Puis, avec un aplomb tout nouveau qui lui venait de l’expérience, elle dit :

— Veuillez m’apprendre votre nom, afin que je puisse vous nommer à mes parents qui recevront votre demande en mariage.

Ce fut dit avec grâce, dans le plus pur style « star ».

Le monsieur eut un sursaut, regarda l’ingénue et avoua piteusement :

— Je suis marié.

Claudine le cingla d’un regard méprisant, lui tourna le dos, et elle l’entendit qui quittait son fauteuil.

Elle était scandalisée, mais elle se formait.

Ce luxe qu’elle voyait sur l’écran était frelaté et il ne comptait que pour éblouir les badauds. Rien n’était réel, tout était pour les yeux seulement, et si des candides y laissaient prendre leur esprit, voire leur cœur, la vie perdait son vrai sens pour eux. Elle avait failli être de ceux-là. Et les salles, que contenaient les salles ? Souvent des êtres suspects qui s’appro­priaient des portefeuilles et combinaient des guets-apens.

Elle rentra à la maison assez songeuse.

La pluie battait contre les immeubles, cette pluie de décembre si froide, si peu sympathique, où le seul désir est un bon feu dans une chambre bien close.

Elle regretta d’être sortie, d’être allée se soumettre de nouveau à l’enchantement néfaste où elle perdait sa propre volonté, pour subir celle de ces princes de la fiction.

Par moments, elle se demandait ce que devenait Maxime. Un malaise la parcourait en songeant à lui. Elle aurait voulu s’entretenir parfois avec lui pour échanger des paroles où leur jeunesse se serait com­prise.