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J’hésitais à lire. Il le fallait pourtant. Je commençai, tandis que Sidonie se retirait discrètement.

Je dus changer de couleur à plusieurs reprises. Les mots, les mots méchants, menteurs, ironiques, dansaient devant mes yeux.

« Mon vieux, Non, ne viens pas. Mes affaires sont en bonne voie. Un plein succès que je n’escomptais pas. Si j’envisageais quelque réussite en venant ici, je ne pensais pas trouver une bonne petite dinde aussi facile à plumer. En plus de sa naïveté, elle est jolie. De beaux yeux verts et des cheveux d’un blond rare. Je l’ai conquise en me disant issu du Nord, car elle suppose avoir des descendants danois ou norvégiens. J’ai de la psychologie et il fallait mettre cette snobinette en confiance. Nous sommes donc « pays », bien qu’elle ne sache rien de ses ancêtres. Son prénom et ses cheveux parlent seuls pour elle. Mais, passons sur ces avantages qui ne sont rien à côté du solide. Je la suppose orpheline et sans famille, par conséquent libre de son argent… et ça, c’est le meilleur pour nous.

« Elle m’a avoué deux cent mille francs, mais j’ai l’impression qu’elle possède davantage. Ses vêtements sortent de chez le bon faiseur. Mon vieux, nous voici de nouveau à flot ! Nous allons revivre la belle vie ! Tu vas me dire que je ne tiens pas encore le magot ? Rassure-toi. Tu sais que c’est un jeu pour moi de faire miroiter le mariage à une innocente, de s’emparer de ses capitaux et de filer avec… Il est si simple de démontrer que les virements de fond ont été mal effectués… que certains placements ont été une erreur… Puis, on joue le désespoir et on va le cacher sous d’autres cieux !

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