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l’ombre s’efface

Brueil-en-Vexin. Nous remarquerons là un groupe de tilleuls qui masque un hypogée. On y trouve parfois un outil, une poterie ou un débris de squelette. Cet endoit s’appelle la Cave aux Fées.

— C’est un bien joli nom, pour un endroit aussi lugubre ! ripostai-je en souriant.

J’étais ravie de cette randonnée avec mon mari, mais tout à coup je me souvins que j’avais passé sur cette route pour aller à Paris… à pied !

Ce souvenir me troubla extrêmement, mais je fus contente cependant de revoir ce paysage, en me demandant si je le reconnaîtrais.

Quelle chaîne d’événements depuis cet épisode dont la cause avait été la fuite de Mantes, loin de l’horrible Garribois !

Je m’assis près de Jacques dans l’automobile con­fortable qui partit silencieusement et rapidement. Bientôt je reconnus la route que j’avais faite en sens contraire.

Mon mari arrêta la voiture à l’entrée d’un chemin et il me désigna, au sommet d’une petite colline, un bouquet d’arbres. Là était la Cave aux Fées. Nous fîmes cette montée en admirant le paysage, et je fus grandement émue car nous contournions la petite maison où j’avais aperçu la jeune fille brune. À ce moment-là, j’aurais tant voulu lui demander asile ! Ma fatigue était si cruelle ! J’avais presque les larmes aux yeux en me remémorant cette douloureuse course et mon déchirant isolement.

Nous arrivâmes près de cette cavité où avaient été enterrés des guerriers en une pose accroupie. C’est ce que m’expliqua mon mari, bien qu’il n’eût pas encore de renseignements précis sur ce lieu.

J’avoue que je ne m’intéressais pas grandement à ce souterrain. Ma pensée était absorbée par mille sentiments plus ou moins poignants qui faisaient bondir mon cœur de reconnaissance pour mon cher Jacques. J’entendais davantage le murmure de ma gratitude que son exposé d’histoire gallo-romaine.

Nous redescendîmes cette colline mélancolique et reprîmes la voiture. Je regardai avec attendrissement la maison basse aux tuiles rouges, mais je n’y vis personne. Où étaient ses habitants ? Que cachaient ce silence et cette absence ? Je ne le sus jamais. Je serais