Page:Fiel - Le fils du banquier, 1931.djvu/125

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agréables, mais on ne se doutait pas que cela irait aussi rapidement.

Le professeur ne dissimulait pas sa joie.

Mme Laslay, les mains jointes, murmurait une prière. Denise avait complètement perdu l’ombre soucieuse qui amenuisait son visage.

Un rayonnement s’étendait sur toute sa personne, et ses yeux, agrandis par le bonheur, regardaient M. Manaut.

Ce dernier enfila à l’annulaire de la jeune fille la jolie bague qu’apportait, triomphant, M. Laslay.

Denise dit, la voix un peu étranglée :

— Ce sera de grand cœur que j’aiderai Gérard en Espagne… Je ne voudrais pas le laisser seul dans une tâche aussi noble…

Pauline, heureuse, elle aussi, du beau dénouement des faits, disait :

— Dieu n’abandonne jamais nos âmes… Pourquoi se révolte-t-on parfois, quand tout est si bien conduit ?…

— Comme je suis contente, soupirait, soulagée, Mme Laslay, que votre fils ne soit plus aussi riche !… Sa fortune, ses largesses, ses dépenses, me causaient de l’épouvante. Je ployais le front sans arrêt sous quelque coup du sort. Je pressentais que Denise eût été malheureuse et qu’elle se fût laissé entraîner par le luxe. Maintenant, elle sait ce que vaut la fortune. Un jour elle est là, le lendemain elle est disparue…

Chacun écoutait ces paroles pleines de sagesse. Denise elle-même, oubliant son bonheur reconquis, avait une gravité sur son visage.

— Oui, vous avez raison, s’écria M. Manaut. Les enfants jouiront mieux de leur bien-être actuel, parce qu’ils ont frôlé la misère… Je n’ai pas besoin de vous dire que mon fils a travaillé comme un manœuvre pour donner du pain à son père…

— Nous savons…, murmura M. Laslay avec une sorte de grandeur.

— Et puis, poursuivit M. Manaut, quand j’ai offert à Gérard de lui reconstituer sa fortune, de travailler seul et de lui laisser reprendre sa vie libre d’autrefois, il m’a arrêté : « Non, père, je tiens à me rendre utile, moi aussi, et à faire partie de ceux qui comptent… »

Des murmures approbatifs sortirent des lèvres des parents, et M. Laslay, rayonnant, serra les mains de M. Manaut en disant :

— Ma fille a trouvé le mari que nous désirions pour elle… Honneur à toi, Manaut !…

Toutes les phases des mois passés revécurent, et l’on convint unanimement que tout s’était passé pour le bien de tous.

Les Bodrot furent loués comme ils le méritaient et Mathilde particulièrement.