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marane la passionnée

— Nouvelles ? Je croyais que ces usages étaient vieux comme le monde. Quand on va se marier, on se préoccupe de son trousseau.

— Mais tu ne te maries pas !

— Cela ne tardera guère !

— Comment cela ? questionna maman en sursautant.

Ses yeux étaient écarquillés par la surprise.

Je prononçai tranquillement :

— Ne dois-je pas épouser M. Descré ?

Ma mère crispa ses doigts sur les bras de son fauteuil et elle me dit sévèrement :

— Ce sont des inepties que tu débites là ! Je voudrais vraiment que tu t’appliques à devenir plus raisonnable.

— Je le suis ! Je sais que j’épouserai notre voisin.

— Il te l’a fait pressentir ? demanda maman avec une pointe d’ironie.

— Pas encore.

— Alors… ma pauvre enfant !

Je repris, toujours assurée :

— Bientôt, il ne pourra plus se passer de moi, et il sera bien heureux que je consente à devenir sa femme. Je dois avouer que je serai enchantée qu’il soit mon mari.

Ma mère, dans sa surprise, ne pouvait plus parler. Je racontais ces choses avec une telle assurance qu’elle se figura que je possédais des certitudes que je lui cachais.

Elle m’interrogea non sans sévérité :

— Je te prie de t’expliquer. Qu’est-ce qui te fait croire à ce dénouement ?

Avec une autorité grave, je répondis :

— L’amour.


XIV


Je devenais recueillie. Peut-être était-ce l’approche de mes dix-huit ans qui me transformait.

J’aimais me promener, moins pour franchir les buissons et admirer la nature, que pour rêver. Les spectacles variés qui se déroulaient sous mes yeux n’étaient plus le but principal de mes courses, mais le cadre nécessaire aux songes qui emplissaient ma tête et qui convergeaient tous vers M. Descré.