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marane la passionnée

— Beaucoup, répondis-je d’un ton bref.

Je me sentais déjà mal à l’aise dans ce salon. Je rendais à ma cousine tous ses regards avec une curiosité tranquille qui tenait du défi.

— J’espère que vous vous plairez avec nous, Marane ?

— Je le pense, répliquai-je sans aménité.

— Vous avez raison, Berthe, c’est une plante sauvage, mais qui n’est pas sans charme. Je vais vous indiquer vos chambres.

Je fus bien aise de me donner un peu de mouvement et je suivis ma cousine en sautant allègrement.

Ces chambres étaient charmantes. La mienne communiquait avec celles des jeunes filles que je me réjouissais de connaître.

J’attendais l’heure du dîner avec impatience. Je pensais même que Mlles de Jilique auraient pu rester à la maison pour me recevoir.

Je fus arrachée à ma mauvaise humeur par l’entrée soudaine de ces trois jeunes beautés, qui me frappèrent d’étonnement.

Comme elles étaient élégantes et sveltes ! Je voyais leurs sourcils fins et déliés, leurs bouches vermeilles et, toutes les trois, possédaient les mêmes joues roses.

L’aînée était blonde et contrastait avec ses sœurs qui étaient brunes.

Elles se nommaient Clotilde, Jeanne et Emma.

Elles m’entourèrent.

— On se tutoie n’est-ce pas ? me dit Clotilde, l’aînée. Comme c’est gentil à toi d’être venue passer un moment avec nous. Tu n’as jamais quitté le bord de la mer ?

— Jamais !

— Que c’est extraordinaire ! s’exclama Emma, alors tu ne connais rien de la vie.

— Tout, répondis-je avec le plus parfait sang-froid.

Ce furent des rires sans fin.

— Tu es joliment savante ! repartit Clotilde.

Seule, Jeanne ne disait rien, mais elle me regardait de ses yeux pénétrants. J’éprouvai tout de suite pour elle une atti-