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Page:Fiel - Prudence Rocaleux, 1945.pdf/157

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prudence rocaleux

les hanches, tête de côté, poitrine en avant, gros pieds dépassant le tablier blanc.

— Dans quel sens êtes-vous artiste ?

— Dans quel sens ? Drôle de question ! Dans le bon sens, parbleu ! J’avais une si belle voix que je voulais entrer à l’Opéra… Je n’ai pas eu le temps, mais Dieu m’a récompensée… Je jouerai quand même dans un théâtre…

— Seigneur ! s’écria Mme Dilaret aux abois, que me dites-vous là ?

— On m’a pris un enfant, Madame, vous le savez…

— Un enfant ? Vous aviez un enfant, vous ? Mme Dilaret, pour le moment, ne se souvenait de la circonstance de la veille tellement les propos de Prudence l’ahurissaient.

— Oh ! que Madame est peu artiste…

— Ah ! ça… est-ce moi qui deviens folle ?

Mme Dilaret était agitée, tandis que Prudence arborait un sourire condescendant.

— Que Madame rappelle ses esprits. L’histoire est neuve, puisqu’elle date d’hier. La scène qui s’est passée hier au parc était une comédie… C’était pour le cinéma… Le directeur n’a pas voulu m’avertir parce qu’il craignait que je joue trop bien… Il me voulait avec ma vraie nature…

— Je commence à voir clair ! murmura Mme Dilaret nettement soulagée de comprendre qu’elle et sa domestique ne perdaient pas la tête…

Sans transition, elle reprit plus gaiement :

— Alors, vous devenez une vedette ? On vous verra sur l’écran ?… Ce sera follement amusant !

Si Prudence se vantait d’être une artiste, elle n’en avait nullement envisagé les conséquences.

De savoir que ses concitoyens allaient la