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prudence rocaleux

— Oh ! j’y suis habituée depuis le temps qu’on me rabâche cette antienne-là ! Les dames font leur bouche en cœur pour dire : faut économiser pour les pauvres prisonniers, et les cuisinières s’usent les sangs à inventer des prodiges, pendant qu’on oublie les prisonniers.

— Prudence !

— Oh ! je ne parle pas encore pour Madame. Je ne connais pas Madame. Il est possible qu’elle soit juste.

— Et je m’occupe des prisonniers, soyez-en sûre.

— Alors, je félicite Madame ! Et maintenant, hop ! au fourneau, et à midi tonnant, j’invite Madame et sa compagnie à ne pas être en retard.

Mme Dilaret étant chassée de sa cuisine s’en revint dans sa chambre, un peu étourdie par les façons de sa nouvelle servante. Elle se demandait avec quelque inquiétude s’il lui serait possible de s’accorder avec elle. Comme le lui avait fait entrevoir le certificat, elle était légèrement intransigeante et paraissait familière.

Elle eut un soupir d’ennui et pensa qu’il ne fallait pas se plaindre avant d’en avoir le sujet. Les domestiques se recrutaient difficilement, et elle devait faire crédit à la bonne volonté de celle-ci.

M. Dilaret rentra un peu avant midi, et tout de suite il s’enquit :

— Il me semble avoir entendu un certain remue-ménage du côté de la cuisine. Vous avez une nouvelle recrue ? Vous en êtes satisfaite ?

— Je n’ai pu encore juger, mais elle paraît débrouillarde.

— Ce n’est déjà pas mal.